Le gouvernement du Québec a déposé en septembre 2019 son projet de loi no 39 modifiant le mode de scrutin. Si l’évènement a été qualifié d’historique, c’est que le système actuellement en vigueur n’a subi aucune modification depuis 1862. Celui-ci n’est d’ailleurs plus adapté aux attentes de la société québécoise, selon la présidente de la CSQ, Sonia Ethier. « D’importantes modifications doivent être apportées afin que le système favorise une réelle représentation proportionnelle », affirme-t-elle.

Déformation de la volonté populaire

L’une des principales lacunes du mode de scrutin actuel : la déformation de la volonté populaire. Prenons comme exemple la dernière élection, en 2018. La CAQ a récolté 37 % du vote populaire, mais elle a obtenu 59 % des sièges à l’Assemblée nationale. De leur côté, le Parti québécois et Québec solidaire ont remporté chacun 8 % des sièges, alors que la population québécoise a voté pour ces partis dans une proportion de 17 et 16 %, respectivement. Ce scénario se répète d’élection en élection.

La parité n’est pas un long fleuve tranquille

Autre lacune du mode de scrutin actuel : la parité. En moyenne, au cours des 20 dernières années, seulement 30 % des députés élus étaient des femmes. La dernière élection a connu une avancée significative, avec 53 % de femmes élues. Il est important de protéger ce progrès qui n’est toutefois pas garanti pour l’avenir.

Que comporte la réforme?

Si le gouvernement du Québec ne met pas en place le nouveau mode de scrutin pour 2022, il reniera sa promesse. La prochaine élection générale se déroulerait donc sous l’ancien système, et la population québécoise se prononcerait par référendum sur l’instauration de la proportionnelle mixte. Si l’on vote en faveur de celle-ci, ce n’est que pour l’élection de 2026 que le nouveau système serait implanté.

Les changements proposés

Concrètement, le jour de l’élection, la population québécoise voterait pour élire 125 députées et députés, comme elle le fait actuellement. Cependant, elle devrait remplir deux bulletins de vote distincts :

  • un vote « classique » pour élire une personne candidate dans la circonscription;
  • un vote « inédit » pour un parti politique servant à élire une personne candidate de la région électorale.

Les personnes députées de circonscription, au nombre de 80, seraient élues de manière majoritaire, comme c’est le cas actuellement. Celles de « régions », au nombre de 45 dans 17 régions, seraient élues, quant à elles, en fonction d’une méthode de calcul qui permettrait de convertir le nombre de votes recueillis et de circonscriptions remportées par un parti en nombre entier de sièges.

Pour qu’un parti politique soit admissible à ce système de compensation, il devrait obtenir au moins 10 % des votes à l’échelle du Québec. Chaque parti présenterait une liste régionale de candidatures (le choix du deuxième vote) pour indiquer quelles personnes occuperaient les sièges régionaux s’il a droit à cette compensation.

Ce que la CSQ recommande

La CSQ soutient la réforme du gouvernement du Québec. Cependant, le projet de loi n39 présenté par le gouvernement Legault limite les améliorations qu’un mode de scrutin mixte proportionnel pourrait apporter au Québec. Il devrait donc être modifié afin :

  • de respecter la parité femme-homme;
  • de garantir un accès au Parlement au parti politique ayant obtenu de 2 à 5 % du vote à l’échelle du Québec;
  • de s’assurer d’une meilleure proportionnalité en diminuant le nombre de régions dans la redistribution des sièges;
  • d’éviter à tout prix de tenir un référendum en période électorale pour ne pas nuire à l’importance d’un tel choix de société.

Malgré la pandémie, le projet de loi pour une réforme du mode de scrutin est toujours vivant et piloté par la ministre Sonia LeBel. Il risque de retourner en étude détaillée, au cours des prochains mois, à l’Assemblée nationale. C’est d’ailleurs ce que souhaite la CSQ.

« Le moment est venu de passer de la parole aux actes. Rapprochons-nous de l’idéal où chaque vote compte réellement », conclut Sonia Ethier.