Randi Weingarten

« C’est un jour sombre pour la jurisprudence américaine. La Cour suprême, influencée par un juge nommé par le président Trump et reconnu pour ses décisions favorisant les riches et les corporations aux dépens des individus, a invalidé 40 ans de décisions unanimes offrant aux enseignants, aux pompiers, aux infirmières et aux policiers et à leurs communautés les moyens de jouir d’une vie meilleure. »

C’est ce qu’avait à dire Randi Weingarten, présidente de l’American Federation of Teachers (AFT), concernant une décision rendue le 27 juin dernier par la Cour suprême des États-Unis dans l'affaire Janus c. American Federation of State, County and Municipal Employees.

Dans cette affaire, M. Janus, un travailleur social de l'Illinois Department of Healthcare and Family Services, avait choisi de ne pas devenir membre de son syndicat. De ce fait, il n’avait pas à payer la pleine cotisation syndicale, mais plutôt la partie de la cotisation expressément allouée à la négociation collective et à la représentation collective, nommée agency fees. Seuls les membres sont tenus de payer la pleine cotisation, qui comprend une portion allouée au discours politique.

Liberté d’expression contre liberté d’association

Or, M. Janus a plaidé avec succès devant la plus haute cour des États-Unis que même cette portion de la cotisation syndicale violait sa liberté d’expression[1] en l’associant à des revendications collectives allant à l’encontre de ses croyances politiques. Par exemple, étant conservateur sur le plan fiscal, il s’opposait à la demande faite en négociation d’augmenter les salaires des employés de l’État.

La cour a rejeté l’idée selon laquelle le fait de permettre aux personnes salariées de ne payer aucune cotisation créerait toute une catégorie de salariés qui profiteraient des avantages de la négociation et de la représentation sans devoir contribuer aux dépenses.

De plus, en niant la justification de leur rôle politique dans le secteur public, la Cour suprême joue le jeu des groupes de droite qui cherchent à éliminer les organisations syndicales.

Un cri de ralliement

Cette décision s’ajoute à plusieurs autres visant à affaiblir les organisations syndicales américaines, mais ces dernières n’ont pas dit leur dernier mot. « Cette décision est un pas dans la mauvaise direction sur le plan économique, mais c’est aussi un cri de ralliement. Nos membres sont plus investis que jamais, et nous allons redoubler d’ardeur pour défendre leurs droits. Les élections d’automne approchent, et nous tenterons d’élire des individus qui croient que les services publics méritent d’être renforcés », conclut Randi Weingarten.


[1] Cette situation ne pourrait survenir au Canada, puisque la liberté d’expression n’a pas ici un poids plus important que celui de la liberté d’association. De plus, la Cour suprême a déjà décidé dans le dossier Lavigne qu’il n’existe pas de droit à la non-association.