La pandémie a mis en évidence l’importance et le caractère indispensable des services publics dans des secteurs comme la petite enfance, l’éducation, et la santé et les services sociaux. Elle a également mis en lumière la contribution majeure des femmes dans ces secteurs et dans notre société en général. Ce sont elles, en effet, qui occupent la majorité des emplois dits du care – ou, en français, des emplois « du prendre-soin et de l’accompagnement ».

Ce sont en grande partie les femmes qui maintiennent opérationnels les réseaux de la santé, de l’éducation et de la petite enfance pendant la crise. Le personnel de ces secteurs à prédominance féminine met les bouchées doubles pour que le Québec ne s’écroule pas.

Une crise qui touche les femmes

Pendant la pandémie, les femmes ont été plus nombreuses que les hommes à perdre leur emploi ou à se retirer du marché du travail. Dès le début de la crise, en mars 2020, l’emploi chez les femmes a diminué de 7 %, comparativement à 4 % chez les hommes, selon Statistique Canada.

Au Québec, sur les 290 000 travailleuses et travailleurs touchés par la crise, les femmes représentent 50 % des personnes au chômage, 90 % de celles et ceux qui sont passés du travail à temps plein au travail à temps partiel et 71 % des gens qui ont quitté le marché du travail.

« Le manque de services, notamment les places dans les services éducatifs à la petite enfance, peut expliquer en partie la proportion importante de femmes qui ont quitté leur emploi », explique la responsable du comité de la condition des femmes de la CSQ, Julie Pinel.

Les problèmes vécus dans les services publics et les effets de la pandémie compliquent aussi la conciliation famille-travail-études-vie personnelle. « Cette situation a aussi une incidence plus importante sur les femmes que sur les hommes, car ce sont surtout elles qui sont responsables des tâches parentales liées aux soins et à l’éducation », ajoute Julie Pinel.

De plus, dans les familles où un proche a besoin de soins, l’implication, la responsabilité et les tâches de proche aidant reposent encore aujourd’hui plus fortement sur les épaules des femmes que sur celles des hommes.

Des mesures équitables à prendre

Bien qu’au Canada, la crise actuelle ait été qualifiée de she-cession (récession au féminin), les mesures de relance proposées par le gouvernement du Québec visent essentiellement des secteurs à prédominance masculine, notamment la construction et le transport.

Traditionnellement, pour rétablir l’équilibre budgétaire, le gouvernement coupe dans les services publics, perçus comme une dépense, pour investir dans les infrastructures. Cependant, pour que la relance économique soit équitable, le gouvernement doit plutôt investir dans les services publics.

Cela favoriserait l’emploi des femmes, qui ont été plus durement touchées par la crise. En tant que grandes utilisatrices de ces services, « elles bénéficieraient aussi de ces investissements dans des services supplémentaires, comme du soutien à domicile pour les personnes proches aidantes ou encore pour la création de places dans les services éducatifs à l’enfance », ajoute Julie Pinel.

Par ailleurs, les services publics se retrouvent partout au Québec. Un investissement dans ce secteur permettrait de soutenir l’économie de l’ensemble des régions.

Le gouvernement doit réfléchir à sa reprise économique en tenant compte des femmes. Il doit fournir une réponse adéquate à la situation actuelle, et cela doit passer par les services publics.

L’histoire le rappelle

Au Québec, ce sont les femmes qui, en majorité, ont construit les bases des systèmes de santé et d’éducation. Les emplois du prendre-soin et de l’accompagnement qui y étaient rattachés étaient autrefois un travail effectué gratuitement par les femmes, dans la sphère familiale, ou encore par le clergé, le plus souvent les sœurs.

« Dans l’imaginaire collectif, il semble tout naturel pour une femme de prendre soin d’autrui, explique Julie Pinel. Malgré le transfert de ces tâches vers des catégories d’emploi dans les services publics, le secteur demeure à prédominance féminine. »

D’ailleurs, une femme en emploi sur trois travaille dans le secteur public.