Le Collectif Échec aux paradis fiscaux propose 12 revendications réalisables et audacieuses qui permettront au Canada de protéger ses revenus, de dissuader le recours aux paradis fiscaux et de devenir un acteur de premier plan sur la scène internationale sur cet enjeu.
Le Collectif Échec aux paradis fiscaux vise à mettre fin au scandale du recours aux paradis fiscaux par les plus fortunés et les multinationales, tant au Québec qu’au Canada. Fondé en 2011, Échec aux paradis fiscaux regroupe des organisations syndicales, communautaires et étudiantes. Ses moyens comptent la mobilisation populaire, l’éducation citoyenne et la concertation auprès des parlementaires
Depuis son élection, le gouvernement Trudeau a instauré quelques mesures, mais ces dernières se sont avérées insuffisantes pour renverser la tendance.
« Le dernier budget fédéral nous a déçus en ce qui a trait à la lutte contre les paradis fiscaux. Nous avons contacté l’ensemble de la députation canadienne pour leur faire part de nos solutions, mais malheureusement, il ne semble qu’aucune d’entre elles n’aient été pleinement reprises. », , déplore Samuel-Élie Lesage, coordonnateur du Collectif.
La population canadienne demande pourtant que l’impunité envers les fortunes et les multinationales qui évitent l’impôt grâce aux paradis fiscaux cesse.
Le Collectif Échec aux paradis fiscaux demande aux partis politiques fédéraux d’adopter ses 12 solutions pour mettre fin au recours aux paradis fiscaux. « Nous désirons qu’un débat national ait lieu sur cette question. Il faut que les partis politiques s’engagent à lutter sérieusement contre les paradis fiscaux », conclut-il.
Qu’est-ce qu’un PARADIS FISCAL?
Un paradis fiscal est un pays ou territoire à fiscalité réduite ou nulle, c’est-à-dire où le taux d’imposition est jugé très bas. Les paradis fiscaux existent sous toutes les formes et un peu partout sur la planète, des petites iles tropicales des Caraïbes aux vieilles principautés de l’aristocratie européenne (ex. : Luxembourg). Ils vont de lieux difficiles à trouver sur une carte géographique jusqu’à des États bien connus comme les Pays-Bas ou l’Irlande.
Comment ça marche, les paradis fiscaux?
L’exemple de KPMG
L’affaire KPMG a été révélée par Radio-Canada en 2016. Il s’agit d’un des plus graves scandales de fraudes fiscales au Canada. KPMG, une firme internationale d’avocats et de comptables, proposait à des individus fortunés un stratagème fiscal leur permettant d’éviter l’impôt au Canada.
Criminaliser l’évitement fiscal et sévir contre les intermédiaires
Nos lois et nos institutions fiscales ont pour rôle de protéger l’intégrité fiscale du pays. Pourtant, il faut revoir l’ensemble, car elles ne permettent pas de bien lutter contre les paradis fiscaux. Actuellement, si la fraude fiscale est illégale au Canada, l’évitement fiscal, incluant le recours aux paradis fiscaux pour réduire des revenus déclarés, ne l’est pas.
Limiter la divulgation volontaire et les arrangements hors cour
Si l’Agence du revenu du Canada (ARC) est censée lutter contre la fraude et l’évitement fiscal, elle offre aux contrevenants les plus fortunés des opportunités pour minimiser leur peine et pour ne pas avoir à subir toutes les conséquences de leurs actes. Il faut changer ce régime de justice à deux vitesses qui favorise les contribuables les plus fortunés reconnus coupables.
S’inspirer des recommandations de la Commission des finances publiques du Québec pour mieux lutter contre l’évitement fiscal
La Commission des finances publiques du Québec (une commission parlementaire composée d’élues et d’élus de tous les partis et étudiant dans le détail des questions fiscales) a proposé plusieurs recommandations astucieuses à l’Agence du revenu du Canada (ARC) pour que cette dernière améliore ses actions de recouvrement, sa reddition de comptes et la lutte contre les paradis fiscaux.
Instaurer un registre public des bénéficiaires ultimes des entreprises
S’il est possible d’éviter l’impôt grâce aux paradis fiscaux, c’est entre autres grâce à l’opacité corporative qui empêche de savoir qui possède des sociétés. Il est cependant possible de percer le secret des entreprises en révélant à qui elles profitent.
Imposer maintenant l’économie numérique
Les entreprises numériques, comme Netflix, occupent des parts du marché canadien de plus en plus grandes, parfois dominantes, dans leur secteur d’activité et font une concurrence déloyale aux entreprises établies au Canada. Certaines de ces entreprises évitent tout impôt au Canada et ne perçoivent pas les taxes de vente, contrairement aux entreprises d’ici, qui sont rigoureusement soumises au régime fiscal et aux contributions sociales en vigueur.
Changer les lois fiscales pour assujettir à l’impôt les revenus et les profits déclarés dans un paradis fiscal et rapatriés au Canada
Les lois fiscales canadiennes sont insuffisantes pour justement percevoir tous les impôts sur les revenus et profits déclarés par les contribuables canadiens à l’international. Actuellement, les lois permettent toujours à un contribuable qui déclare des revenus et des profits dans un paradis fiscal de les rapatrier dans certains cas au Canada tout en étant exonéré d’impôt. Autrement dit, l’ARC peut difficilement imposer et recouvrer les sommes déclarées par un contribuable dans un paradis fiscal!
Revoir les liens du Canada avec des paradis fiscaux notoires
Le Canada entretient plusieurs liens diplomatiques et fiscaux troublants avec des paradis fiscaux notoires. Ces liens prennent souvent la forme de conventions fiscales de non double imposition. Ces conventions sont toutefois beaucoup moins sensées quand elles lient le Canada avec des paradis fiscaux. De fait, elles permettent aux entreprises de profiter de l’absence (ou de faibles taux) d’impôt dans ces pays pour ne pas avoir à payer (ou si peu) l’impôt sur les activités qui y sont déclarées.
L’impôt unitaire
Actuellement, chaque filiale d’une société multinationale est imposée comme étant une entité distincte. Cela permet aux multinationales d’organiser leurs affaires et de procéder à des transactions entre l’ensemble de leurs filiales afin de minimiser leur facture globale d’impôt. De plus en plus de spécialistes proposent de réformer la fiscalité internationale des sociétés multinationales afin de les imposer non pas sur les profits de chacune des filiales du groupe, mais plutôt sur la base du profit consolidé de la multinationale. C’est ce qu’on appelle le système de la taxation unitaire des sociétés multinationales.