Montréal, le 14 septembre 2020. – La Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (FPPE-CSQ) est choquée d’apprendre que, depuis la rentrée, des directions d’école dans différentes régions du Québec imposent aux professionnelles et professionnels des heures de surveillance et de désinfection qui réduisent le temps de services directs aux élèves. Dans le contexte des annonces du 17 août dernier faites par le ministre de l’Éducation, qui visaient d’ajouter des services professionnels pour combler les besoins des élèves en difficulté en diminuant les tâches administratives, la FPPE-CSQ entend un tout autre son de cloche sur le terrain.
Par son « filet de sécurité », Jean-François Roberge prétendait libérer les employés professionnels de 560 000 heures de bureaucratie pour qu’ils puissent passer plus de temps avec les élèves vulnérables et soutenir les membres des équipes-écoles. La Fédération s’est plutôt rendu compte qu’il y a des centres de services scolaires où non seulement rien n’a changé du côté des tâches administratives d’échantillonnage et de validation des cas, mais les professionnelles et les professionnels sont contraints à de nouvelles obligations qui n’ont rien à voir avec leur expertise.
Dans certains cas, tous les jours de la semaine, plus de la moitié des employés professionnels d’une école sont appelés à exécuter une variété de tâches inhabituelles : nettoyage des toilettes et des vestiaires, surveillance aux portes d’entrée, durant les pauses et le dîner, accueil des voitures et des autobus scolaires, gestion de la désinfection des mains, accompagnement des élèves dans les corridors, et même suppléance en classe. Les services professionnels étant déjà considérablement réduits depuis des années d’austérité et de pénurie de personnel, ces nouvelles exigences viennent réduire davantage les heures de soutien offertes aux élèves pour les aider à combler leur retard scolaire durant cette rentrée particulière.
« Nous sommes évidemment d’accord avec l’idée de diminuer les tâches administratives et de passer plus de temps avec les élèves. Nous étions en train d’évaluer le nombre d’heures libérées qu’avançait le ministre Roberge, qui est beaucoup trop élevé à notre avis, et l’application de cette mesure dans les centres de services scolaires. Mais quel choc de constater qu’en plus, on nous impose des tâches qui ne sont pas les nôtres! Le gouvernement doit tenir sa promesse et adopter des mesures claires pour augmenter, au lieu de couper encore une fois, les services professionnels. C’est un manque de respect flagrant de notre expertise et ça ne peut pas continuer! », déplore Jacques Landry, président de la FPPE-CSQ.
La Fédération a constaté que les demandes de tâches de soutien auxquelles le personnel professionnel est affecté sont beaucoup trop fréquentes, inscrites dans les horaires quotidiens et hebdomadaires, et se soldent par une réduction importante des services aux élèves. Ces fonctions, documentées par la FPPE-CSQ, empêchent les orthopédagogues, psychologues, psychoéducateurs, orthophonistes, ergothérapeutes, travailleurs sociaux ou conseillers d’orientation d’un centre de services scolaires d’aider des dizaines d’élèves vulnérables en cette période charnière. Ce temps pourrait être mis à profit aussi pour des rencontres multidisciplinaires avec tous les membres d’une équipe-école afin d’évaluer les besoins et se concerter sur les services à offrir pour outiller tant le personnel que les élèves avec des interventions efficaces.
« C’est normal de mettre la main à la pâte et d’aider ponctuellement nos équipes-écoles à la mise en place des nouvelles mesures sanitaires, mais il faut que ce soit temporaire et non régulièrement ajouté à notre charge de travail. On ne le répétera jamais assez : les élèves ont grand besoin de nos services, et ce, particulièrement cette année. Depuis la rentrée, on constate qu’ils sont nombreux à vivre des difficultés, mais ils attendent toujours d’être accompagnés. C’est difficile pour eux de raccrocher après six mois d’absence des bancs d’école et c’est extrêmement malheureux qu’après plus de deux semaines, plusieurs professionnelles et professionnels n’aient pas encore commencé à les aider », insiste Jacques Landry.
La FPPE-CSQ dénonçait la semaine dernière le manque de respect des recommandations de la Santé publique et le manque de matériel de protection pour les professionnelles et professionnels du réseau, limitant ainsi les interventions auprès des élèves. Alors que les besoins sont immenses et qu’il y a un manque criant de personnel, la Fédération condamne l’incohérence d’imposer des tâches non professionnelles à ses membres, d’autant plus que le gouvernement s’est engagé à investir dans des embauches de ressources et à « mieux faire avec les ressources existantes ». Le président de la Fédération exige des directives claires de la part du ministère de l’Éducation aux directions d’école et aux centres de services scolaires afin d’augmenter réellement la disponibilité des services professionnels.
« C’est facile pour le ministre de faire des belles promesses et de lancer des campagnes publicitaires. Mais encore faut-il travailler ensemble et que ces promesses se traduisent concrètement sur le terrain. Nous avons la volonté de soutenir les milliers de jeunes vulnérables qui ont beaucoup souffert des derniers mois sans école et la solution n’est certainement pas de faire appel au privé. Nous avons l’impression qu’on nous met des bâtons dans les roues et qu’on nous fait miroiter des mirages. Les élèves et le personnel méritent mieux! », conclut Jacques Landry.