Balado Prendre les devants, Petite enfance

Services de garde éducatifs à la petite enfance : vecteur de changements sociaux

11 mars 2025

Avec son réseau de services de garde éducatifs à l’enfance, le Québec a bâti un modèle public unique qui fait l’envie ailleurs dans le monde. Près de 30 ans plus tard, il reste encore beaucoup de travail à faire pour reconnaître ce réseau à sa juste valeur, ainsi que le travail des éducatrices et du personnel qui le soutiennent, a souligné Anne-Marie Bellerose, présidente de la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec (FIPEQ-CSQ) lors du balado Prendre les devants.

Par Anne-Marie Tremblay, collaboration spéciale

Si l’accès aux services de garde a un impact sur la conciliation travail-famille, cela a aussi un effet non négligeable sur le développement des enfants. Un aspect qui n’est pas toujours reconnu, estime Anne-Marie Bellerose. « Beaucoup de gens s’imaginent que les éducatrices passent leur journée à jouer avec les enfants, lance-t-elle. À la blague, je les invite souvent à passer ne serait-ce qu’une heure avec nous pour voir la réalité du terrain. Les enfants apprennent en jouant, mais tout est structuré et adapté à leurs besoins. Pour ceux qui présentent des défis particuliers, nous mettons en place des stratégies spécifiques pour stimuler certaines facettes de leur développement. »

Un réseau qui se détériore

« Malheureusement, nous sommes en train de perdre le côté éducatif du réseau et de sabrer dans la qualité des services, après toutes les mesures d’austérité dans notre réseau », dénonce la présidente. Elle cite en exemple la réduction, par le gouvernement, du ratio d’éducatrices qualifiées dans les CPE depuis la pandémie.

Cette baisse des exigences entraîne des conséquences directes sur la valorisation de l’emploi. « C’est comme si on envoyait le message que tout le monde pouvait faire ce travail, illustre-t-elle. Résultat : une diminution des inscriptions dans les programmes de formation collégiale. » Le gouvernement a aussi multiplié les formations courtes, qui ne laissent pas le temps aux étudiantes de développer toutes leurs compétences.

Bref, force est de constater que le réseau est en mauvais état actuellement, explique la présidente : « Cinquante pour cent des éducatrices quittent le domaine après deux ans, parce que la charge de travail est trop importante. » Ces départs s’expliquent aussi par les salaires peu élevés dans le réseau, ajoute-t-elle.

Pour freiner cette hémorragie, le gouvernement doit impérativement améliorer les conditions de travail afin de retenir les professionnelles qualifiées et d’attirer la relève. Un rapport de la vérificatrice générale, publié en mai 2024, a d’ailleurs mis en lumière une baisse de la qualité des services de garde au Québec. « Pourtant, ce même rapport montre que la qualité est la plus élevée dans les CPE et les services de garde en milieu familial régis et subventionnés. Il est donc impératif de remettre l’enfant au cœur des décisions », affirme Anne-Marie Bellerose.

Dans un monde idéal, la présidente aimerait revenir à un réseau constitué uniquement de services de garde publics, qui entretient des liens avec les CLSC et les centres de services scolaires. « Parce que, oui, cela prend des places, mais il faut surtout offrir des services de qualité, donc avoir les ressources nécessaires pour accompagner les enfants, notamment ceux à besoins particuliers. Ils seront mieux outillés, et donc moins vulnérables, lors de leur entrée à l’école. » Investir aujourd’hui aura donc des effets sur leur trajectoire à long terme, plaide-t-elle.

*Les propos ont été édités pour faciliter la compréhension.

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