Québec, le 7 février 2023. – Interpellée par l’ampleur du chantier découlant du projet de loi no 3, Loi sur les renseignements de santé et de services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) demande que toutes les précautions nécessaires soient prises pour assurer le respect des droits fondamentaux de toutes et tous. Elle a déposé, hier, un mémoire en ce sens à la Commission des finances publiques dans le cadre des consultations tenues par le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, M. Éric Caire.
Bien sûr, la CSQ partage la volonté gouvernementale d’améliorer l’accès et la qualité des services offerts à la population du Québec, de même que la gestion du réseau de la santé et des services sociaux. Toutefois, si les objectifs poursuivis peuvent sembler légitimes, elle s’oppose à certaines stratégies d’utilisation des données de santé qui soulèvent de sérieux enjeux de protection de renseignements.
« Ce projet de loi de 267 articles, modifiant 33 lois, ne nous a pas permis, jusqu’à maintenant, de bien circonscrire tous les enjeux de la refondation en cours. Une telle approche nous incite à une très grande prudence quant aux objectifs, mais surtout aux effets, de cette vaste transformation de l’utilisation des renseignements de santé. Notre analyse nous commande de rester vigilants et de proposer des modifications nécessaires pour éviter d’ouvrir une boîte de Pandore de renseignements personnels », a déclaré M. Luc Beauregard, secrétaire-trésorier de la CSQ.
Ainsi, la CSQ recommande notamment :
- Que la définition de renseignements de santé et de services sociaux soit mieux encadrée et ne puisse pas être modifiée par voie réglementaire, puisqu’elle constitue le cœur de la loi;
- Que les règles permettant de donner un consentement explicite, de le modifier ou de l’annuler soient clairement définies par voie réglementaire et que ce consentement soit réitéré sur une base périodique;
- Que la collecte, l’accès et l’utilisation d’informations génétiques, qui ont un potentiel identificatoire si croisées avec d’autres renseignements personnels, fassent toujours l’objet d’un consentement explicite, et ce, pour chaque fin spécifique;
- Qu’un comité de la Commission de l’éthique en science et en technologie (CEST) documente et surveille l’usage des algorithmes décisionnels et l’utilisation des technologies de profilage en santé et services sociaux, puisqu’elles pourraient aller jusqu’à porter préjudice et discriminer certaines personnes ou certains groupes de la société;
- Que les implications de toute demande d’accès aux renseignements pour des fins autres que celles pour lesquelles ils ont été recueillis soient également surveillées par la CEST;
- Que des mécanismes d’analyse et de surveillance des enjeux éthiques, entièrement indépendants, soient prévus dans le texte législatif.
Financement axé sur le patient : des réponses attendues
La CSQ comprend que le projet de loi à l’étude met également la table pour le financement axé sur le patient, qui nécessite la cueillette de nombreuses données clinico-administratives. C’est un sujet qu’elle analyse depuis plusieurs années en raison des nombreux problèmes pourtant connus et des nombreuses questions restées sans réponse. Voilà pourquoi la CSQ recommande au gouvernement de faire l’évaluation humaine et financière des différents projets pilotes de financement axé sur le patient, dont certains datent de 2016, et de rendre enfin public l’ensemble des résultats.
« L’intégration de nombreux systèmes d’information combinée à la volonté de mettre en œuvre le Plan santé dans les meilleurs délais, tout cela sur fond de crise dans le système de santé et de services sociaux, de l’épuisement de nos membres et de la pénurie de personnel chronique, nous apparaît très périlleux. Il serait vraiment malheureux que cette révolution se fasse au détriment des gens. Ce serait le contraire du système plus humain souhaité par ceux qui le portent actuellement à bout de bras », a conclu M. Beauregard.
On peut consulter le mémoire de la CSQ ici.