Environnement, Santé

Justice climatique et santé : donner aux communautés les moyens d’agir

26 février 2025

Les populations vulnérables sont les plus touchées par les changements climatiques en raison des inégalités sociales. Face à ce constat, l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) propose une approche de justice environnementale misant sur la mobilisation communautaire en santé.

Par Audrey Parenteau, rédactrice en chef

Les conséquences des changements climatiques sur la santé sont multiples : augmentation des vagues de chaleur, propagation des maladies infectieuses, augmentation des problèmes respiratoires et multiplication des catastrophes naturelles.

Toutefois, ces effets ne sont pas répartis équitablement. « La recherche scientifique a clairement démontré que les personnes pauvres, les personnes racisées, celles vivant avec un handicap et les personnes âgées sont les plus à risque de voir leur état de santé être affecté négativement par les conséquences de la crise climatique », affirme le chercheur Maxime Fortin de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS). Les personnes vulnérables ont aussi moins de ressources pour faire face aux aléas climatiques, par exemple les vagues de chaleur.

Dans leur étude sur la crise climatique, les inégalités de santé et la justice environnementale, Maxime Fortin et la chercheuse Anne Plourde rapportent aussi que, au sein des pays du Nord, les minorités ethniques et raciales subissent aussi un racisme environnemental qui les expose à des zones polluées, comme c’est le cas des communautés autochtones au Canada.

Un réseau de santé limité face à ces enjeux

Malgré la reconnaissance de ces inégalités, le système public de santé du Québec manque de moyens pour y faire face. Le nombre d’organisatrices et organisateurs communautaires, professionnels chargés de favoriser la mobilisation citoyenne, est resté quasiment stable depuis les années 1990, stagné à 354 en 2020, soit moins de 0,2 % des effectifs du réseau de la santé. Pourtant, selon les chercheurs, ces acteurs jouent un rôle clé dans l’adaptation aux changements climatiques en favorisant l’action collective et la résilience communautaire.

« Historiquement, les organisatrices et organisateurs communautaires ont contribué à mobiliser les communautés locales contre les inégalités sociales en santé », explique Maxime Fortin. L’IRIS propose donc une réforme ambitieuse visant à quintupler le nombre d’organisatrices et organisateurs communautaires pour atteindre 2 250 postes, avec un coût annuel estimé à 140 millions de dollars.

« En quintuplant leur nombre, on donnerait au réseau les moyens d’embaucher du personnel consacré aux changements climatiques », précise le chercheur.

Vers une justice environnementale intégrée au système de santé

L’approche de la justice environnementale vise à intégrer la participation citoyenne et la lutte contre les inégalités au sein des politiques climatiques et sanitaires. Cette stratégie permettrait de redonner du pouvoir aux communautés les plus touchées, notamment les populations racisées et autochtones, en les impliquant directement dans les processus décisionnels.

« La participation des citoyennes et citoyens ainsi que des communautés dans l’élaboration des politiques visant à contrer la crise climatique est primordiale. C’est un moyen efficace d’éviter que ces politiques reconduisent ou aggravent les inégalités de santé », affirme Anne Plourde.

Toutefois, des obstacles demeurent. La création de l’agence Santé Québec a réduit les espaces de participation citoyenne au sein du système de santé. Pourtant, le Québec possède une tradition forte d’organisation communautaire qui pourrait être mobilisée pour renforcer la résilience des populations face aux changements climatiques.

Face à l’urgence climatique et aux inégalités sanitaires croissantes, la proposition de l’IRIS d’augmenter significativement le nombre d’organisatrices et organisateurs communautaires dans le réseau de la santé représente une solution concrète pour rendre la lutte climatique plus juste et inclusive.

Pour aller plus loin

Consultez la fiche Donner au système de santé la capacité d’agir, publiée par le Laboratoire de recherche et d’informations en santé et services sociaux de l’IRIS.