Les maux de la langue

Anacoluthe

14 juin 2023

Anacoluthe, tout comme ectoplasmeanthropophage et macrocéphale, fait partie des jurons colorés du capitaine Haddock. Mais c’est aussi une figure de style. Ce terme vient du grec anacoluthon, qui veut dire « absence de suite dans les idées ». Cette figure de style est donc une rupture dans la construction d’une phrase.

Elle est utilisée en littérature pour créer un effet de surprise. La plus connue nous vient des Pensées de Pascal : « Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé. » (On se serait attendu à ce que « le nez » soit le sujet du verbe principal.)

Dans les textes courants, l’anacoluthe est considérée comme une faute de syntaxe. On la repère entre autres lorsque la proposition en tête de phrase n’a pas le même sujet que la proposition principale. Elle est fréquente dans les formules de salutations : « Espérant une réponse favorable, veuillez agréer l’expression de mes sentiments distingués. » Le sujet de la proposition subordonnée (je) n’est pas le même que celui de la proposition principale (vous), d’où la discontinuité. Pour corriger la faute : « Espérant une réponse favorable, je vous prie d’agréer… »

De cette erreur de style peut découler la description de situations inusitées :

Caché dans le classeur, il n’a pu retrouver son dossier.

En arrivant plus tôt au bureau, mes textes ont été prêts à temps.

Ce matin en ouvrant sa fenêtre, la pluie tombait.

Assise près du quai, la lune éclairait la gardienne.

Pour rétablir la vérité, on pourrait écrire :

Il n’a pu retrouver son dossier qui était caché dans le classeur.

Comme je suis arrivée plus tôt au bureau, mes textes ont été prêts à temps.

Ce matin, lorsqu’elle a ouvert sa fenêtre, la pluie tombait.

La lune éclairait la gardienne assise près du quai.

Saviez-vous que…?

On a répertorié près de 2000 sacres québécois formés à partir d’une quinzaine de mots religieux. Ils caractérisent le français d’ici et sont mondialement étudiés sur le plan linguistique. Ils sont employés comme interjection, mais aussi comme nom, comme verbe et comme adverbe pour exprimer des émotions. Autrefois interdits et même passibles d’amendes et d’emprisonnement s’ils étaient blasphématoires, les jurons sont maintenant plutôt considérés comme une transgression sociale et font partie du tabou langagier. Si leur origine et leur évolution vous intéressent : Les sacres en français québécois | Usito.

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