Montréal, le 22 mai 2019. – « Si le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Jean-François Roberge, vise l’augmentation du taux de réussite dans les cégeps, il devra inévitablement améliorer l’accessibilité des services offerts par le personnel professionnel aux étudiantes et étudiants ayant des besoins particuliers. Le défi est énorme alors que les professionnelles et professionnels désireux de travailler dans le réseau se font de plus en plus rares. »
La présidente de la Fédération du personnel professionnel des collèges (FPPC-CSQ), Suzanne Tousignant, réagit ainsi à de récents commentaires faits par le ministre.
« Dans une entrevue accordée au magazine L’Actualité, le ministre Roberge affirme vouloir octroyer plus de moyens facilitant la réussite des jeunes étudiantes et étudiants qui accèdent à l’enseignement collégial, notamment par une plus grande disponibilité du personnel professionnel dans les cégeps. C’est bien beau de dire cela, mais s’il veut y parvenir, il va devoir mettre fin à la sous-valorisation des emplois de professionnels dans les cégeps », explique Suzanne Tousignant.
Des corps d’emplois sous-payés
Cette dernière précise que les corps d’emplois professionnels dans les cégeps sont largement sous-payés par rapport au reste de la fonction publique et aux autres provinces.
« Plusieurs catégories d’emplois encore considérés à prédominance masculine, comme les conseillers d’orientation et les aides pédagogiques individuels, sont sous-rémunérées. Et si c’est vrai pour les corps d’emplois masculins, ce l’est d’autant plus pour les corps d’emplois à prédominance féminine qu’on retrouve souvent uniquement dans les secteurs du réseau collégial, de l’éducation et de la santé et des services sociaux, comme les travailleurs sociaux, les conseillères en services adaptés et les psychologues. »
Une ségrégation professionnelle qui perdure
La présidente de la FPPC-CSQ se demande pourquoi ces secteurs offrent des salaires systématiquement plus bas que dans le reste de la fonction publique. « Serait-ce parce que ces secteurs sont majoritairement composés de personnel féminin? », questionne-t-elle.
Elle rappelle que l’Institut de recherche et d’informations socioéconomique (IRIS) a répondu à cette question en démontrant, dans sa recherche portant sur l’impact de la ségrégation professionnelle du secteur public que, « la combinaison de la ségrégation professionnelle et de la stagnation salariale qui affecte l’administration québécoise indique la présence d’une discrimination systémique fondée sur le sexe » et que, « la Loi sur l’équité salariale ne suffit pas à corriger cette forme de discrimination ».
Suzanne Tousignant déplore que les emplois traditionnellement féminins (éducation, santé, petite enfance, etc.) soient encore aujourd’hui moins valorisés que les métiers traditionnellement masculins (ingénierie, construction, finance, etc.).
De graves problèmes d’attraction-rétention à l’horizon
« Le gouvernement va devoir se réveiller rapidement, parce qu’en période de pénurie de main-d’œuvre comme celle prévalant en ce moment et qui va s’aggraver au cours des prochaines années, les professionnelles et professionnels qui voudront travailler dans le réseau collégial se feront de plus en plus rares. Ça signifiera non seulement des services professionnels insuffisants pour les étudiantes et étudiants qui présentent des besoins particuliers, mais aussi une gestion chaotique du réseau collégial. C’est déjà commencé », prévient Suzanne Tousignant.
Des solutions sur la table
En terminant, la leader syndicale précise que la FPPC-CSQ a l’intention de profiter des prochaines négociations dans le secteur public pour proposer des solutions au manque de personnel professionnel dans les cégeps.
« Cependant, je me questionne sur la réelle volonté du gouvernement caquiste à améliorer la situation dans les cégeps, parce qu’on en a déjà proposé des solutions à la Table qui discute du rangement salarial des conseillères et conseillers pédagogiques, mais sans succès. Il est donc à prévoir que les problèmes ne feront que s’aggraver », conclut Suzanne Tousignant.