Syndicalisme

Le syndicalisme nuit-il à l’économie?

14 avril 2025

Dans le contexte de guerre tarifaire avec les États-Unis et d’incertitude économique, il est légitime de s’interroger sur le rôle des syndicats dans l’économie. On entend souvent que le syndicalisme freine l’innovation, la productivité et le changement – bref, qu’il ralentirait les activités économiques –, mais plusieurs arguments démontrent plutôt le contraire.

Par Félix Lebrun-Paré, délégué et membre du comité d’action sociopolitique de la CSQ*

Tout d’abord, selon le Fonds monétaire international (FMI) (une institution que l’on peut difficilement qualifier d’organe de propagande gauchiste), une faible classe moyenne et l’aggravation des inégalités constituent un frein à la croissance économique.

Or, les syndicats jouent un rôle essentiel dans le renforcement de la classe moyenne et la redistribution des richesses. Non seulement ils contribuent à réduire l’écart des revenus au sein des entreprises, mais leur influence s’étend également aux milieux non syndiqués en exerçant une pression pour offrir des conditions de travail comparables. De plus, ils favorisent la mise en place de politiques sociales redistributives (fiscalité plus juste, accès aux services de garde, logement abordable, etc.).

Ainsi, à l’encontre de préjugés répandus, une étude de la Banque mondiale (une autre organisation rarement accusée de sympathies socialistes) menée dans 17 pays ne trouve aucune corrélation entre un taux élevé de syndicalisation et une faible performance économique. Les exemples des pays scandinaves, comme la Suède, la Finlande et le Danemark, en sont la preuve : avec un taux de syndicalisation avoisinant les 70 %, contre 39 % au Québec, ces nations affichent une économie solide, accompagnée de programmes sociaux et de services publics de qualité.

Dans le contexte actuel de la mise en place de tarifs douaniers, les syndicats peuvent exercer une pression importante sur le gouvernement des États-Unis. Par exemple, le puissant syndicat américain United Steelworkers a publié une déclaration commune avec le Syndicat des métallos du Canada pour dénoncer « l’attaque économique contre les travailleurs des deux pays ». Les deux syndicats rappellent que « les travailleurs canadiens et américains ne sont pas en concurrence [et qu’ils] fabriqu[ent] des produits ensemble ».

Sachant qu’un des seuls leviers d’influence sur l’administration Trump est la grogne des travailleuses et travailleurs américains, cette déclaration pourrait bien peser dans la balance.

En savoir plus

Voici quelques suggestions de lectures pour vous faire une idée sur le sujet.

Les syndicats nuisent-ils au Québec? – Comment répondre à 10 questions sur les syndicats et l’économie, par Philippe Hurteau.

Unions and Collective Bargaining: Economic Effects in a Global Environment, par Toke Aidt et Zapheirēs Tzannatos.

Regard statistique sur la couverture syndicale au Québec, ailleurs au Canada et dans les pays de l’OCDE, par l’Institut de la statistique du Québec. Gouvernement du Québec. Québec, 2014.

* Félix Lebrun-Paré est délégué au Syndicat des professionnelles et professionnels de la santé publique du Québec (SPPSPQ-CSQ) et membre du comité d’action sociopolitique de la CSQ.