Santé
Privatisation : pas question!
13 mars 2025
Notre système de santé public est en danger. Lors d’un panel qui a eu lieu dans le cadre de l’événement Le privé tout, sauf santé!, des spécialistes ont exposé les effets néfastes de la privatisation, qui déstabilise un pilier essentiel de notre société. Leur message est sans équivoque : la marchandisation des soins n’est pas une évolution inévitable, mais une menace immédiate pour l’accès équitable et la qualité des services de santé. Il est urgent d’agir collectivement.
Par Félix Cauchy-Charest, conseiller CSQ
Un système public face aux logiques du profit
La chercheuse Anne Plourde, de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), et Damien Contandriopoulos, professeur titulaire à l’école des sciences infirmières à l’Université de Victoria, dénoncent un glissement vers une logique où le profit prend le pas sur le bien-être du patient. Selon eux, la privatisation transforme nos hôpitaux et cliniques en entreprises lucratives, reléguant en arrière-plan une prise en charge humaine et adaptée aux besoins de la population.

Cette transformation est loin d’être anodine : elle creuse des inégalités déjà trop présentes et laisse de côté celles et ceux qui ne peuvent pas se permettre de payer pour des services supposés universels. Dans un contexte où l’accès aux soins est de plus en plus conditionné par des critères économiques, les populations les plus vulnérables sont laissées pour compte par un système qui devrait les soigner.
Fragmentation, dégradation et perte de contrôle démocratique
Anne Plourde et Damien Contandriopoulos nous alertent sur les dangers d’une fragmentation dangereuse des services de santé causée par la privatisation. Contrairement à un système public intégré qui assure une coordination efficace, l’introduction du privé multiplie les acteurs poursuivant chacun ses propres intérêts. Cette dispersion complique la mise en place d’une stratégie globale et cohérente, et expose le système à des défaillances dans la continuité des soins.

La logique de « rentabilité à tout prix » entraîne également des suppressions de postes et une dégradation des conditions de travail, ce qui compromet la qualité des services. Mais au-delà de l’organisation des soins, il s’agit d’un recul démocratique majeur. En confiant la gestion de la santé à des entités privées, c’est tout le pouvoir de décision publique qui se délite au profit d’intérêts financiers.
Des conséquences dramatiques pour la santé publique et la cohésion sociale
Le panel a mis en lumière l’impact de la privatisation sur l’ensemble du système de santé. Comme l’explique Anne Plourde, ce glissement vers un modèle commercial ne bénéficie qu’à une minorité et accentue les inégalités déjà criantes. En rendant les soins inaccessibles pour une partie de la population, le tissu social s’affaiblit.
La logique du profit dévalue la dignité humaine en traitant la santé comme une marchandise et non comme un droit fondamental. Dans ce climat, la confiance des citoyennes et citoyens envers leur système de soins s’effrite, ce qui peut conduire à des conséquences sanitaires désastreuses lors de crises où un accès rapide et universel aux soins est essentiel.
Comment agir?
Face à cette dérive, le panel ne s’est pas contenté d’exposer les dangers. Anne Plourde et Damien Contandriopoulos proposent une feuille de route claire et militante pour contrer la privatisation :
- La mobilisation citoyenne et une sensibilisation immédiate
Le premier levier de la résistance est la mobilisation. Selon les spécialistes, il est essentiel de sensibiliser la population aux dangers de la privatisation. Organiser des rassemblements, mener des campagnes sur les réseaux sociaux et dénoncer les impacts concrets de la marchandisation des soins sont autant d’actions nécessaires pour préserver un système public.
- L’engagement syndical
Les syndicats de la santé jouent un rôle crucial dans ce combat. Les travailleuses et travailleurs sont en première ligne pour constater les effets dévastateurs de la logique de privatisation : suppressions de postes, surcharge de travail et dégradation des conditions de service. Par leur mobilisation, les syndicats doivent faire pression sur les décideurs et rappeler que le bien-être des patientes et patients ne peut être sacrifié sur l’autel de l’équilibre budgétaire.
- Influencer le discours politique
Les panélistes insistent sur l’importance d’un engagement politique fort et le besoin de dialoguer avec les instances gouvernementales pour promouvoir des solutions de rechange crédibles à la privatisation en s’appuyant sur des données concrètes et des témoignages puissants. L’objectif : convaincre les élues et élus que la santé doit demeurer un domaine public, régulé et accessible à toutes et tous.
- La solidarité comme forme d’action
La coordination entre syndicats, associations citoyennes, groupes communautaires et experts universitaires permet de renforcer le mouvement. La mise en place de réseaux d’entraide et de partage d’informations favorise une résistance organisée, capable de peser durablement sur les décisions politiques et d’assurer la pérennité de notre système de santé public.
Action pressante contre un danger imminent
La privatisation de notre système de santé représente une menace immédiate et insidieuse. Anne Plourde et Damien Contandriopoulos estiment qu’il est urgent que tous les acteurs concernés se mobilisent. Il ne s’agit pas seulement de défendre un modèle de gestion, mais de préserver l’essence même de notre démocratie et le bien-être collectif.
Le temps n’est plus aux demi-mesures. Si nous voulons sauver notre système de santé, nous devons refuser que les logiques marchandes dictent son avenir. La privatisation n’est pas une fatalité, c’est un choix politique, et nous avons le pouvoir de le contester.