Montréal, le 19 février 2025. – La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) réagit au projet de loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève ou de lock-out déposé par le ministre du Travail, Jean Boulet, ce matin, et y voit une atteinte au rapport de force des travailleuses et des travailleurs et des organisations syndicales qui les représentent.

« Pour nous, il est clair que ce projet de loi induit une rupture dans l’équilibre des relations de travail acquis chèrement à coup de luttes syndicales, notamment devant les tribunaux, au cours des dernières années. Et c’est impossible de ne pas y voir un lien avec les dernières négociations du secteur public », de réagir le président de la CSQ, Éric Gingras.

Il précise aussi que, dans le contexte politique, économique et social actuel, le gouvernement, les employeurs et les organisations syndicales auront besoin de travailler ensemble et non pas l’inverse.

« Ce projet de loi n’était vraiment pas nécessaire. Le gouvernement change les règles du jeu parce qu’il n’a pas aimé comment s’est déroulée la dernière négociation du secteur public ni l’issue de celle-ci. Or, ces règles lui allaient pourtant très bien alors que, pendant des dizaines d’années, elles lui ont été favorables. J’insiste : tout ce qui nous a amenés à cette mobilisation et à ce règlement était légitime, et d’ailleurs soutenu par la population. C’est un mouvement unique qui ne s’était pas vu depuis plus de 40 ans », déplore Éric Gingras, tout en rappelant qu’un projet de loi visant à « moderniser » les relations de travail dans les secteurs public et parapublic est également attendu cet hiver.

Si la Centrale voit d’un bon œil que ce soit au Tribunal administratif du travail (TAT), et non pas directement au ministre, que revienne la responsabilité de se pencher sur quels services devront être maintenus, elle souligne que différents éléments du projet de loi seront analysés dans les prochains jours.

« Sur la nouvelle notion de services à maintenir, il faudra voir, par exemple, comment les critères sont établis, comment ils seront interprétés et quels services seront ciblés. Tout est dans les détails et dans l’application subséquente. Sur le fond des choses, au-delà des récriminations et du mécontentement que peuvent générer les conflits de travail, il n’en demeure pas moins que cet élément du projet de loi, peu importe son libellé, limite le droit de grève », explique Éric Gingras.

Par ailleurs, il est nécessaire de rappeler que, depuis l’adoption du Code du travail en 1964, qui a octroyé le droit de grève dans les services publics, les services essentiels ont toujours été centrés sur la santé et la sécurité de la population. Le glissement de cette notion sur le « bien-être » de la population nous apparaît excessivement large et risque d’entraver sérieusement le droit de grève, qui est pourtant considéré par les tribunaux comme un droit fondamental.

Nonobstant le fait que le secteur public ne sera pas touché par le nouveau mécanisme alternatif mis en place par ce projet de loi, la CSQ insiste sur le fait que c’est tout l’écosystème des négociations collectives qui sera affecté par ces changements. « Nous sommes déçus que le ministre du Travail ait tout de même choisi de jouer dans ce jeu-là », de conclure son président.