Éducation, Négociation

Lettre | Tout ce qui traîne se salit

13 février 2025

Plus d’un an après la conclusion des négociations du secteur public partout au Québec, le personnel de l’éducation travaillant à la Commission scolaire Kativik est toujours en négociation. Malgré les mandats de grève détenus par les membres du personnel de soutien scolaire et les professionnelles et professionnels, malgré la séquence de grève exercée par les enseignantes et enseignants au retour du congé des fêtes en janvier, les négociations s’éternisent et s’enlisent.

En plein contexte de pénurie, alors que l’attraction et la rétention du personnel sont justement au cœur des enjeux de cette négociation, les collègues du Nunavik n’ont toujours pas droit aux mêmes bonifications de leurs conditions de travail ni aux hausses salariales pourtant consenties au personnel de l’éducation partout ailleurs au Québec. S’il est vrai que les négociations au Nord sont particulières et comportent une part d’ajustements nécessaires, il n’y a aucune raison pour que les délais se creusent à ce point. C’est d’ailleurs un problème récurrent depuis plusieurs rondes de négociation.

Jamais une telle situation ne serait tolérée ailleurs qu’au Nord. Elle perdure pourtant au vu et au su de nombre d’observateurs. Et ce qui est dérangeant, c’est que, tant du côté du gouvernement que de la commission scolaire, on se renvoie la balle.

Mais que se passe-t-il donc à Kativik?

Le nœud du conflit, c’est que la Commission scolaire Kativik utilise la négociation avec le personnel de l’éducation comme levier de négociation avec le gouvernement pour faire avancer d’autres dossiers. En termes clairs : la commission scolaire prend le processus de négociations collectives en otage au détriment des conditions de travail du personnel de l’éducation, de la capacité d’attraction et de rétention au Nord et des services offerts. Actuellement, ce sont les communautés et les jeunes qui en font les frais.

Tout ce qui traîne se salit, dit-on. C’est assurément le cas des négociations avec la Commission scolaire Kativik! Parce qu’inévitablement, ces conflits de travail engendrent aussi un lot de tensions dans les communautés, ce que personne ne souhaite. Nous constatons au quotidien à quel point les problèmes de sous-financement en éducation au Nunavik causent des torts importants et engendrent des conséquences multiples. Faut-il seulement rappeler les enjeux d’accès à l’eau courante dans plusieurs communautés à différents moments de l’année? Et à ce chapitre, nous joignons notre voix pour dénoncer haut et fort le sous-financement.

Nos organisations syndicales ont mené des consultations démocratiques auprès des membres qu’elles représentent, nous portons leurs demandes en leur nom. Or, faut-il le rappeler, une négociation collective est d’abord et avant tout un processus mené pour négocier de bonne foi les conditions de travail des travailleuses et des travailleurs. Ce n’est pas le lieu pour régler l’ensemble des enjeux politiques. Et, même si l’objectif de la Commission scolaire Kativik est d’augmenter non pas la part de tarte, mais la tarte en soi, elle ne peut pas le faire en utilisant, comme elle le fait présentement, le processus de négociation collective. Cela ne répond pas à une négociation juste et équitable pour le personnel. À preuve, il n’y a actuellement aucun travail qui se fait aux tables de négociation.

Nous insistons : jamais une telle situation ne pourrait perdurer si elle se déroulait ailleurs qu’au Nord. La distance éloigne la précarité de la situation et l’attente se fait dans un silence assourdissant qui érode la confiance.

Dans l’intérêt commun, il faut que les négociations avec le personnel de l’éducation du Nord se règlent rapidement et équitablement. Et il est évident qu’il faudra de la volonté politique.

Signataires :

Nadine Bédard-St-Pierre, 1re vice-présidente de la CSQ
Richard Bergevin, président de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ)
Éric Pronovost, président de la Fédération du personnel de soutien scolaire (FPSS-CSQ)
Jacques Landry, président de la Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (FPPE-CSQ)
Larry Imbeault, président de l’Association des employés du Nord québécois (AENQ-CSQ)
Carolane Desmarais, présidente du Syndicat du personnel professionnel de l’éducation du Nunavik et de l’Ouest de Montréal (SPPENOM-CSQ)