Travail

Osons repenser le travail

24 septembre 2024

Vous avez lu, cet été, les derniers polars et romans de fantaisie publiés chez votre éditeur préféré? Maintenant que la rentrée est bien amorcée, la CSQ vous propose quelques ouvrages suscitant une réflexion profonde autour du thème du travail : Travailler moins ne suffit pas de Julia Posca, Le stress au travail vs le stress du travail de Sonia Lupien et Osons la joie au travail d’Anne-Valérie Rocourt. Tour d’horizon des sujets qui y sont traités.

Par Félix Cauchy-Charest, conseiller CSQ

Bien que ces livres diffèrent dans leurs approches, difficile de ne pas voir des parallèles lorsqu’on les enfile l’un après l’autre! Y est abordée d’un point de vue sociologique, psychologique et plus individualiste, la question du travail moderne, de ses impacts et des moyens de l’améliorer.

La réduction du temps de travail : une panacée?

Dans l’essai Travailler moins ne suffit pas, Julia Posca explore l’idée qu’une simple réduction du temps de travail ne suffira pas à résoudre les problèmes liés à l’aliénation et au mal-être au travail. Elle rappelle que les gains en termes de réduction des heures travaillées (passées de 3 000 heures annuelles à 1 625 heures annuelles en moyenne au Québec) n’ont pas nécessairement rendu les travailleuses et les travailleurs plus heureux. Au contraire, le travail, qui continue d’occuper une place centrale, est souvent perçu comme un fardeau.

Selon l’autrice, il est nécessaire de repenser en profondeur l’organisation des systèmes économique et social de manière à garantir une véritable émancipation des travailleuses et des travailleurs qui restent subordonnés à des objectifs qu’ils ne contrôlent pas.

Travailleuses et travailleurs toujours stressés

Ce constat trouve écho dans les travaux de la neuropsychologue Sonia Lupien qui, dans son ouvrage Le stress au travail vs le stress du travail, analyse le stress omniprésent dans les entreprises modernes. Elle y expose comment l’organisation actuelle du travail et les modes de communication fragmentent l’attention des employés, augmentant ainsi leur stress et nuisant à leur productivité.

D’après l’autrice, la solution ne se limite pas à réduire les heures de travail, mais bien à repenser la manière dont les tâches sont organisées. Il faudrait, notamment, réintroduire des périodes de concentration profonde où les interruptions sont minimisées pour permettre au cerveau de fonctionner de manière optimale. Ces changements dans l’organisation du travail seraient essentiels pour diminuer le stress chronique affligeant bon nombre d’entre nous.

Le bonheur au travail : une quête individuelle ou collective?

Si Julia Posca et Sonia Lupien s’intéressent aux dysfonctionnements systémiques du travail, Anne-Valérie Rocourt adopte, dans son ouvrage Osons la joie au travail, une approche plus individualiste en insistant sur la nécessité de cultiver de petites joies au quotidien.

Elle encourage cette culture, loin de la notion souvent superficielle de « coordonnateur au bonheur », souvent vue comme une tentative de la part des organisations d’instaurer du bonheur forcé. Anne-Valérie Rocourt souligne que chaque employée ou employé a un rôle à jouer dans son propre bien-être et que l’appréciation des petites victoires peut transformer l’expérience professionnelle.

Un point commun

Bien que l’approche abordée dans Osons la joie au travail diffère de celles des deux autres ouvrages, les trois livres convergent sur un point : le travail ne devrait pas être uniquement une source de souffrance ou d’aliénation. Que ce soit à travers une réduction des heures, une réorganisation des tâches ou une attitude plus positive au quotidien, ces réflexions partagent un objectif commun, celui d’améliorer la qualité de vie des travailleuses et des travailleurs.

Le travail dans la société capitaliste : un point de divergence?

L’un des principaux points de divergence entre ces ouvrages tient en leurs postures respectives sur la société capitaliste. Julia Posca adopte une vision plutôt critique du système économique actuel. Elle souligne que, même si nous travaillons moins qu’il y a deux siècles, les salariées et salariés ne possèdent toujours pas de véritable contrôle sur leurs conditions de travail. Elle appelle à une réorganisation collective, avec des réformes radicales pour placer les besoins humains et environnementaux au centre de l’économie.

Sonia Lupien adopte quant à elle une approche plus pragmatique et se concentre sur la réduction du stress au travail sans remettre en question le système qui génère ce stress. Elle ne blâme pas directement les entreprises, mais les invite à mieux comprendre les mécanismes du cerveau pour réduire l’épuisement professionnel chez leur personnel. Elle propose des solutions simples sur papier, comme des journées dédiées au travail en profondeur ou des horaires flexibles, sans toutefois tenir compte du contexte complexe qui empêche souvent de les mettre en place.

Anne-Valérie Rocourt se situe quelque part entre ces deux positions. Sans critiquer ouvertement le capitalisme, elle propose une démarche plus introspective, suggérant que chaque individu peut trouver des sources de satisfaction et de bonheur dans son environnement professionnel, sans attendre de transformations radicales du système.

Vers un avenir du travail plus équilibré?

Les trois ouvrages dressent cependant un constat clair : le travail, tel qu’il est organisé aujourd’hui, ne répond plus aux attentes des travailleuses et travailleurs modernes. Que ce soit par des réformes systémiques, une meilleure organisation des tâches ou une attitude plus positive face à notre quotidien, il est urgent de repenser notre rapport au travail pour y trouver un meilleur équilibre entre productivité, satisfaction personnelle et bien-être.

Voilà donc trois essais à lire et qui vous permettront d’enrichir votre réflexion face aux défis contemporains du monde du travail.