Syndicalisme
Comment favoriser le dialogue social?
29 juin 2024
Quelle est la place des acteurs de la société civile dans la participation publique? C’est la question abordée par les personnes conférencières lors de l’atelier sur la représentativité et le dialogue social proposé lors du 44e Congrès de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).
Par Jean-François Piché, conseiller CSQ | Photos : Pascal Ratthé
Les congressistes ont été fort nombreux à assister à cet atelier qui fut l’occasion de parler de l’impératif de la présence des groupes sous-représentés ou marginalisés, comme les femmes et les personnes racisées, au sein des instances de participation.
Chercheuse et directrice du Centre de recherche sur les politiques et le développement social, Laurence Bherer a amorcé sa présentation en précisant que le terme « société civile » comprend toutes les organisations non gouvernementales qui ont un objectif social ou politique. Avec un graphique clair à l’appui, elle a ensuite expliqué que la participation publique se fait sur un continuum qui va d’une simple information citoyenne à une participation directe à la prise de décision.
Elle a également fait ressortir un fait que nous percevons tous : une diminution des lieux de concertation depuis une décennie. Le rôle de partenaires de l’État qu’ont tenu historiquement plusieurs groupes de la société civile est en perte de vitesse. L’État se centralise et prend des décisions, tout en accordant de moins en moins d’importance à la construction d’un consensus social.
Laurence Bherer a également souligné le fait que la professionnalisation de ces groupes de la société peut laisser percevoir une perte de lien avec les citoyens. Bien que cette personnalisation soit importante, car elle permet de développer une expertise et d’avoir une crédibilité auprès des décideurs publics, il est consternant que la perception de rupture avec les citoyens soit ensuite utilisée par certains gouvernements pour refuser à certains groupes un espace de discussion.
Comment améliorer la participation de la société civile?
À cet effet, Laurence Bherer suggère d’améliorer l’imputabilité des groupes de la société civile tout en favorisant la mobilisation. Il devient aussi nécessaire de créer des alliances entre les différents groupes.
Titulaire de la Chaire de recherche du Canada en éthique féministe, la conférencière Naïma Hamrouni a démontré, avec des images fortes, la désolante absence des femmes et des personnes racisées au sein des milieux d’affaires, de la politique, des lieux de pouvoir, de nos institutions publiques et des universités.
Naïma Hamrouni a soulevé des arguments qui montrent l’importance de corriger la situation :
- cette sous-représentation des femmes et des personnes racisées est une discrimination directe, pourtant interdite par nos chartes; elle est systémique, car les obstacles qui se dressent sur la route de ces groupes créent un cercle vicieux;
- le racisme et le sexisme sont vécus au quotidien dans les milieux de travail;
- le fonctionnement de nos sociétés a été conçu de telle sorte que les femmes sont reléguées aux tâches domestiques, faisant en sorte qu’elles doivent maintenant assumer ce rôle, en plus de travailler, ce qui cause une fatigue mentale extrême;
- la somme de ces éléments fait en sorte qu’il y a chez les femmes et les groupes racisés une perte de confiance envers les institutions.
Or, Naïma Hamrouni insiste : l’exigence de la présence des femmes et des groupes racisés est impérative. Pour ce faire, il faut :
- corriger les effets de la discrimination persistante;
- neutraliser les effets de l’exclusion structurelle;
- présenter aux jeunes filles et aux minorités des modèles à suivre.
Elle a conclu en disant que la présence des femmes et des groupes sous-représentés ou marginalisés dans toutes nos institutions favorise l’excellence, la compétitivité et la rentabilité des organisations, car ces personnes permettent la prise en compte de nouvelles façons de faire, des points de vue différents et, finalement, elles enrichissent la société tout entière.
Des pistes d’action pour notre triennat
Forts de ces enrichissantes présentations, les congressistes ont lancé des pistes d’action pour le prochain triennat de la CSQ. Certaines étaient bien ancrées dans les milieux de travail comme les établissements d’enseignement à tous les niveaux (écoles, collèges, universités), d’autres ont mis l’accent sur l’importance de la formation des personnes à la prise de parole, notamment pour les groupes sous-représentés. Plusieurs personnes participantes ont également invité la Centrale et ses affiliés à modifier les pratiques syndicales afin de favoriser l’inclusion. D’autres ont soulevé l’idée d’aller à la rencontre des personnes de ces groupes sous-représentés et de les inviter à parler de leur réalité pour ouvrir le dialogue.
Bref, les débats ont été riches et mettent solidement la table pour un plan d’action triennal riche et inclusif !