Pendant la pandémie, la transformation du travail en télétravail a mis encore plus en évidence le phénomène de la connexion permanente. Le droit à la déconnexion apparaît maintenant comme une nécessité pour préserver l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. À cela s’ajoutent d’autres éléments comme la charge de travail, l’intensification et l’extensification de celui-ci, l’arrivée de l’Internet et le développement d’outils technologiques.

Connexion permanente

Lien virtuel en continu avec le travail et l’employeur

Hyperconnectivité

Le fait d’être branché de façon constante aux terminaux de connexion mobile

Connaitre les causes pour trouver des solutions

Se déconnecter du travail est bien plus facile à dire qu’à faire ! Mieux comprendre les causes de la problématique de l’hyperconnectivité est essentiel pour identifier des solutions.

Dans le secteur public, les professions s’exercent dans le cadre d’une relation humaine. Se détacher de l’enjeu relationnel devient difficile, voire impossible. Ces emplois dits du care entraînent une charge mentale qui se répercute en dehors des heures de travail. Le droit à la déconnexion devient alors un enjeu permanent pour les travailleuses et les travailleurs.

Intensification du travail et hyperconnectivité

Deux études menées par la CSQ ont démontré qu’il y a une intensification du travail. Ce phénomène, allié à la pandémie, a créé un terrain propice à la connexion permanente.

L’augmentation du phénomène d’hyperconnectivité fait en sorte que nous sommes passés de l’intensification du travail à l’extensification de celui-ci, soit l’allongement de la journée de travail.

La façon de travailler se transforme, car le télétravail et le travail hybride sont là pour rester. Ils exigent cependant une plus grande vigilance, tant pour assurer un sain équilibre entre vie professionnelle et vie privée que pour prévenir des problèmes de santé.

Légiférer ou pas?

Doit-on légiférer sur le droit à la déconnexion, comme l’ont fait certains pays ? Bien que louable, on constate que ce type de politique ne vise qu’à réguler les communications entre les différentes instances d’une organisation. On ne prend pas en compte les enjeux liés à l’intensification et l’extensification de la charge de travail et au brouillage entre vie privée et professionnelle. Comme si encadrer les communications allait régler spontanément la connexion permanente ou l’hyperconnectivité.

Des remparts collectifs

En revanche, il existe des remparts collectifs permettant de contrer la connexion permanente et l’hyperconnectivité. La Loi sur les normes du travail définit les conditions que doivent remplir les personnes salariées quant à leur disponibilité ; cependant, cette Loi ne prend pas en compte le télétravail ou le travail en mode hybride.

La Loi modernisant le régime de santé et de sécurité au travail (LMRSST) adoptée en 2021 vient confirmer que les droits et obligations de chaque partie concernent aussi le télétravail. En effet, la Loi atteste qu’il y a des risques psychosociaux liés au télétravail et oblige tant les employeurs que les travailleuses et travailleurs à instaurer des mesures de correction. Ces risques vont de la surcharge de travail à l’affectation de la conciliation vie professionnelle – vie privée en passant par une hausse du sentiment d’insécurité.

Les solutions collectives

La connexion permanente n’est pas une problématique individuelle. Elle est liée à l’organisation et à la charge du travail ainsi qu’à l’obligation de performer.

La LMRSST oblige les organisations de 20 travailleuses et travailleurs et plus à former un comité de santé et sécurité au travail (SST). Le rôle du comité consiste à identifier les risques présents en milieu de travail, de les analyser puis de recommander à l’employeur des mesures de correction. Une source de ces risques est l’hyperconnectivité. Le comité est tenu de tenir un registre des accidents de travail et des événements qui auraient pu en causer afin d’identifier les risques, leur gravité et leur récurrence.

Le comité SST peut mettre en place une activité sur l’importance de se déconnecter du travail, comme le fait le Barreau du Québec. Chaque année, il tient son « Défi… On décroche ! » : ainsi, il est interdit de communiquer avec ses collègues entre 19h et 7h en février.

Conventions collectives, règles et ententes locales

Différents articles de conventions collectives traitent du temps de travail, du temps de présence ou encore de la disponibilité. Les travailleuses et travailleurs peuvent s’y référer pour être au fait des règles qui encadrent leur disponibilité obligatoire au travail. Ces règles concernent aussi les personnes qui assument des responsabilités syndicales.

Par ailleurs, certains employeurs pourraient adopter des règles ou des politiques sur l’utilisation d’outils technologiques qu’il fournit, dont les téléphones cellulaires. Ils peuvent également encadrer les périodes de communications avec le personnel.

Le syndicat peut convenir d’ententes locales afin de clarifier certains points en lien avec la disponibilité du personnel ou l’utilisation d’outils technologiques. D’autres ententes permettront de clarifier les délais attendus et convenables pour répondre aux courriels.

Mettre sur pied une activité de sensibilisation avec les différents intervenants constitue un moyen simple pour favoriser la déconnexion au travail. À l’ordre du jour : échanges sur les meilleures pratiques à adopter pour contrer la déconnexion et trouver des solutions durables.

Les solutions individuelles

Comme les solutions collectives peuvent tarder à s’implanter, nous proposons ici quelques solutions individuelles favorisant un meilleur équilibre entre le travail et la vie privée. Ce sont, en fait, des facteurs de protection.

Il est possible de configurer son téléphone, sa tablette et son ordinateur pour cesser de recevoir des courriels ou des alertes. En choisissant l’option notifications, on sélectionne les applications dont on ne souhaite plus recevoir d’alertes après les heures de travail. Un autre truc est de fermer complètement sa tablette ou son ordinateur en dehors des heures de travail. Pour les applications de collaboration, comme Teams, on peut choisir son statut en indiquant que l’on est absent.

L’envoi différé permet de transmettre un message à un collègue, de peur de l’oublier. On l’aide ainsi à se déconnecter en différant la livraison de notre message. Quant aux réseaux sociaux professionnels, on choisira de se déconnecter ou de désactiver son statut en ligne et d’activer celui d’absence.

Afin d’éviter d’être en état d’alerte constant, signe d’hyperconnectivité, l’utilisation de la fonction de disponibilité ou de non-disponibilité redonne le contrôle sur son emploi du temps. On peut ainsi se consacrer à une tâche spécifique sans que l’on se sente obligé de répondre aux courriels, par exemple.

Conclusion

Se déconnecter du travail est une nécessité à laquelle nous avons droit collectivement et individuellement. Sans régler tous les enjeux de surcharge de travail, l’adoption de pratiques favorisant la déconnexion peut contribuer à un meilleur équilibre travail – vie privée.