Santé

« Il faut défendre nos valeurs collectives »

5 octobre 2023

La commissaire à la santé et au bien-être du Québec (CSBE), Johanne Castonguay, lançait très discrètement, le 6 septembre dernier, une consultation afin de sonder la population au sujet des valeurs sur lesquelles appuyer l’évaluation du système de santé et de services sociaux. Si la nouvelle aurait pu réjouir, elle suscite plutôt des inquiétudes en raison du parti pris que semble entretenir la commissaire en faveur du privé.

Dans une lettre ouverte publiée dans plusieurs médias, dont Le Soleil, la Coalition Solidarité Santé, qui regroupe plusieurs organisations dont la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), mentionne que « plusieurs signaux captés au cours des derniers mois concernant les travaux de la commissaire nous inquiètent de plus en plus sérieusement ».

La Coalition affirme que « son opinion [celui de la commissaire] sur le système de santé est déjà faite », rappelant par le fait même les propos de Johanne Castonguay lors de sa conférence devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le 5 juillet dernier : « La commissaire a affirmé que la nécessaire transformation du système de santé du Québec passait par davantage de partenariats public-privé, et que, compte tenu de la méfiance de la population envers le secteur privé, une éducation globale sur cette question était nécessaire. »

Dans une lettre adressée directement à la commissaire à la santé et au bien-être, envoyée le 5 octobre, le secrétaire-trésorier de la CSQ et responsable du dossier de la santé, Luc Beauregard, ainsi que la présidente de la Fédération de la Santé du Québec (FSQ-CSQ), Isabelle Dumaine, font part des préoccupations de la Centrale et de sa fédération au sujet du processus de consultation et de ses visées réelles.

« Nous considérons que les enjeux en cause sont beaucoup trop importants pour accepter qu’une simple consultation très ciblée, limitée et peu médiatisée serve de pierre angulaire aux travaux de votre institution, d’autant plus que vous affichez déjà publiquement votre volonté de privatiser notre réseau public de santé et de services sociaux », ont-ils écrit.

Les groupes de discussion mis en place dans le cadre de la consultation débuteront à la mi-octobre dans cinq régions du Québec (Montréal, Québec, Gatineau, Sherbrooke et Rimouski). Ils ciblent quatre groupes de personnes : les citoyennes et citoyens, les médecins, les usagères et usagers et leurs proches ainsi que les professionnelles et professionnels de la santé. 

Défendre nos valeurs collectives et assurer la primauté des services publics

La Coalition Solidarité Santé rappelle que « depuis plus de 50 ans, les groupes sociaux du Québec se battent pour réduire les inégalités sociales et faire respecter les droits, notamment pour assurer l’accès à des services publics de santé à toutes et tous, peu importe leur capacité de payer ». 

Avec l’assurance maladie publique, la société québécoise s’est donné les moyens d’aider et de soigner tous les gens qui en auraient besoin, peu importe leur statut social ou économique. « Bien entendu, de nombreuses personnes attendent toujours les services et les soins requis par leur état de santé. Assurément, il faut changer certaines façons de faire. De là à ouvrir toute grande la porte au privé sous prétexte d’une plus grande efficacité non démontrée, il n’en est pas question! », affirme la Coalition.

Face aux changements climatiques et à leurs effets sur la santé des populations, la CSQ estime qu’il est plus que jamais primordial d’investir dans les services publics. « Nous l’avons constaté, les crises de l’ampleur de la COVID-19 commandent une intervention rapide des autorités publiques, une réponse que seuls les systèmes publics de santé et de services sociaux bien rodés et financés peuvent orchestrer », dit Luc Beauregard. 

Réhumaniser le réseau de la santé 

La CSQ et la FSQ-CSQ soulignent dans leur lettre adressée à la commissaire que « les travailleuses et les travailleurs sont au cœur de notre système public de santé. Sans le personnel, tout plan ou toute réforme visant à améliorer l’accès aux soins et aux services requis par la population du Québec est voué à l’échec ».

Plus que jamais, la consolidation de nos services publics de santé et de services sociaux nécessite une attention particulière des problématiques touchant directement le personnel, comme les conditions de travail et d’exercice, l’épuisement, la santé et la sécurité du travail ainsi que la pénurie de main-d’œuvre.

Pour Isabelle Dumaine, il est essentiel d’offrir des conditions de travail et d’exercice plus humaines et respectueuses du personnel : « Il faut cesser d’accorder un traitement privilégié au personnel du secteur privé, et ainsi mettre fin à la démobilisation du personnel du secteur public et à l’exode des ressources publiques vers le privé. »

Les grandes valeurs défendues

La Centrale et sa fédération en santé défendent les grands principes suivants:

  • Assurer la primauté des services publics
  • Redonner un véritable pouvoir aux régions
  • Miser sur la prévention et sur une santé publique régionale forte
  • Réhumaniser le réseau de la santé
  • Défendre le droit des femmes à une réelle égalité
  • Réaffirmer le rôle social de l’État