Alma, 4 septembre 2013. – À l’occasion de l’audience de la Commission nationale d’examen sur l’assurance-emploi à Alma, la CSD, la CSN, la CSQ, la FTQ, l’APTS et le SFPQ ont présenté, par le biais de mémoires, un ensemble de propositions pour que le régime retrouve sa vocation d’origine, en protégeant efficacement les travailleuses et les travailleurs victimes du chômage.
Une réforme qui aggrave le problème
Alors qu’en 1989, 83,8 % des chômeuses et chômeurs avaient accès à des prestations régulières, ce taux est passé à 43,9 % en 1997. Depuis cette période, la couverture n’est pas allée en s’améliorant. En 2011, le pourcentage des personnes admissibles est passé à 41,3 %, atteignant ainsi son plus bas niveau depuis la fin des années 1990.
« Au Saguenay – Lac St-Jean, la réforme a des conséquences désolantes tant dans le secteur de la santé et des services sociaux qu’en éducation. Plusieurs de nos membres, même lorsqu’ils obtiennent un contrat à temps partiel, doivent compenser par les prestations d’assurance-emploi afin de s’assurer un revenu décent. Et cette réforme est loin de toucher seulement les syndiqués », a déclaré Nathalie Savard, présidente du Syndicat des intervenantes et intervenants de la santé du Nord-Est québécois (CSQ).
Loin de régler le problème du chômage et d’améliorer le nombre et la qualité des emplois créés, cette réforme risque, au contraire, d’accentuer l’insécurité et la précarité sur le marché du travail, en plus de frapper de plein fouet certaines industries. « Toutes les régions seront touchées. Celles où dominent les activités saisonnières, bien sûr, mais aussi les régions urbaines qui comptent un nombre important de travailleurs saisonniers ou temporaires dans une foule de secteurs comme les services publics, la construction, le tourisme et la foresterie », a poursuivi Brigitte Claveau, présidente régionale du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ).
Des changements qui s’imposent
Les six organisations demandent au gouvernement d’apporter plusieurs changements à l’assurance-emploi pour mieux protéger les personnes en situation de chômage. « L’importance de l’assurance-emploi pour notre région est capitale. Le travail saisonnier comme la foresterie, la construction et l’agriculture est partie intégrante de notre activité économique. Ce revenu d’appoint, payé par les travailleuses et travailleurs ainsi que par les employeurs, est essentiel pour que la population puisse vivre décemment toute l’année. Il est également essentiel pour des travailleurs du milieu de l’éducation, comme les chargés de cours. L’assurance-emploi doit être accessible et efficace pour que notre région demeure vivante et dynamique, c’est aussi simple que ça ! » a expliqué Engelbert Cottenoir, président du Conseil central du Saguenay – Lac St-Jean–CSN. « D’autre part, nous jugeons que l’admissibilité au régime ne doit pas varier en fonction du taux de chômage, du nombre d’heures travaillées au cours d’une semaine et du statut de nouvel arrivant sur le marché du travail. Elle doit reposer sur un critère unique et universel afin d’éviter des situations où, dans une même région, deux secteurs peuvent avoir des règles différentes, par exemple le Saguenay et le Lac St-Jean », a ajouté Linda Riverain de l’Association du personnel professionnel et technique de la santé et services sociaux (APTS).
« Il ne faut pas oublier que cette réforme de l’assurance-emploi a commencé à nous faire mal vers 1995, lorsque le gouvernement s’est approprié le surplus de la caisse de l’assurance-emploi de plus de 53 milliards de dollars. À ce moment-là, le syndicat d’Alcan à Arvida, le SNEAA, dont j’étais le président, a fait un recours contre le gouvernement de l’époque pour le vol du surplus de la caisse, surplus accumulé parce que l’assurance-emploi était déjà rendue difficile d’accès aux femmes monoparentales, aux jeunes et à tous les travailleurs saisonniers. Aujourd’hui, ce n’est qu’une suite de ce qui a été entamé il y a près de 20 ans : cette fois-ci, la réforme touche à plusieurs autres secteurs comme la construction, la forêt et le tourisme qui sont de très gros marchés dans notre région, ce qui ne manquera pas de nous appauvrir davantage, et c’est sans compter tous les domaines à statut précaire qui touchent tous les travailleurs et toutes les travailleuses de la province », a déclaré le conseiller régional de la FTQ au Saguenay−Lac-Saint-Jean, Jean-Marc Crevier.
Selon les organisations syndicales, le financement du programme cause aussi problème. Depuis sa mise en place en 1940 jusqu’en 1990, le financement du régime était tripartite : employé-es, employeurs et gouvernement fédéral. En 1990, malgré une vaste opposition, le gouvernement a retiré sa participation financière au régime (projet de loi C-21).
« En posant ce geste, le gouvernement fédéral s’est non seulement déresponsabilisé du chômage et de la création d’emploi, mais il a aussi réduit son appui au développement régional et a altéré la fonction de redistribution du revenu du régime. Nous avons toujours dénoncé le retrait de l’État du financement du régime et nous croyons qu’il est plus que temps d’y remédier », a souligné Jean-Rock Larouche, conseiller syndical de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD).
Les six organisations syndicales exhortent le gouvernement à prendre ses responsabilités en ce qui a trait au mode de financement du régime, auquel seuls les travailleuses et les travailleurs et les employeurs sont appelés à participer à l’heure actuelle.
La contre-réforme du gouvernement Harper est une attaque frontale aux régions comme le Saguenay – Lac St-Jean. Affichant un taux de chômage de 9,6 % au deuxième trimestre de 2013 et composant avec de nombreux emplois saisonniers, notamment dans les milieux forestier et touristique, les changements au régime ne feront que diminuer l’accessibilité au programme et augmenter la précarité de l’économie régionale en favorisant la mobilité des travailleuses et travailleurs. « Nous sommes convaincus qu’un retour aux fondements mêmes du programme dans le sens de ces propositions rendrait le régime d’assurance-emploi non seulement plus équitable, mais aussi mieux adapté aux besoins des travailleuses et des travailleurs, ainsi qu’à la réalité diversifiée des régions, tant au Québec que dans l’ensemble du Canada », ont conclu les porte-paroles de la CSD, CSQ, CSN, FTQ, APTS et du SFPQ.