CSQ LE MAGAZINE : VOUS AVEZ COMMENCÉ VOTRE CARRIÈRE COMME ENSEIGNANT AU PRIMAIRE. QU’EST-CE QUI A DÉCLENCHÉ VOTRE DÉSIR DE VOUS IMPLIQUER SYNDICALEMENT?

Éric Gingras : J’ai commencé à enseigner en 1996 et j’ai fait ça pendant huit ans. Dès 1997, je me suis impliqué syndicalement comme délégué. J’ai ensuite obtenu le poste de coordonnateur par intérim au Syndicat de Champlain en 2004, en remplacement de Monique Pauzé, qui elle-même remplaçait Réjean Parent devenu président de la CSQ. J’ai ensuite été élu vice-président de la section Marie-Victorin en 2007, puis j’ai occupé les fonctions de président du Syndicat de Champlain à partir de 2013.

Je me suis toujours impliqué, notamment au sein d’associations étudiantes. Comme j’ai grandi dans Côte-des-Neiges, à Montréal, un secteur défavorisé et pluriethnique, j’ai toujours été à l’affut des inégalités et je m’intéressais beaucoup à la justice sociale.

En enseignement, un milieu où le syndicalisme est présent, j’ai eu le gout de continuer à m’impliquer.

QUEL SERA LE GRAND DÉFI QUE LA CSQ AURA À RELEVER AU COURS DES PROCHAINES ANNÉES?

Il faudra expliquer mieux, et de façon plus transparente, ce que nous faisons, dire pourquoi nous le faisons et ancrer nos actions dans le quotidien. Nous devons, par exemple, prendre le temps d’expliquer à nos membres que nous participons à une commission parlementaire pour défendre nos valeurs.

Grâce à la technologie, nous sommes capables de faire tout cela. Nous nous exposons toutefois à la critique, mais c’est correct. Plus nous informerons les gens, plus ils prendront conscience de ce que nous faisons. Ils auront davantage le gout de s’engager et ils se rendront compte que nous ne sommes pas des « pousseux de crayon ».

C’EST DONC IMPORTANT D’INFORMER LES MEMBRES, MÊME EN TEMPS DE NÉGOCIATION?

C’est effectivement essentiel. Lors de la dernière négociation, nous avons tenu nos membres informés comme nous ne l’avons jamais fait auparavant, mais je pense que nous pouvons faire plus.

Nous commencerons bientôt une nouvelle négociation. Informer nos membres de ce qui se passe pendant cette période devra faire partie de notre stratégie. Comment nous y prendrons-nous? Je ne sais pas. J’ai besoin des idées de tout le monde. Nous irons consulter nos membres et le conseil général.

Nous ferons d’abord le bilan des dernières négociations avec nos différentes structures syndicales. Nous prendrons un moment lors de nos instances pour discuter des communications de la CSQ et de nos façons de faire. Nous verrons ensuite ce qui ressortira de ça. Je ne veux pas présumer maintenant de ce qui s’y dira.

Moi, je veux que les membres aient un déclic et que les gens embarquent. La prochaine négo, c’est presque demain! Nous devons déjà nous préparer.

QUELS SONT LES DÉFIS QUE LA CSQ DEVRA RELEVER AU COURS DES PROCHAINES ANNÉES?

Dans la société, il y a actuellement une remise en question des institutions en général et, aux yeux de nos membres, les grandes organisations syndicales en font partie. Comme toutes les grandes centrales syndicales, la CSQ doit être en mesure d’expliquer pourquoi elle est importante. Moi, je le sais, nos personnes déléguées le savent, mais certains membres se questionnent, car ils ne voient pas ce qu’une centrale syndicale peut leur apporter.

Dans des groupes hétérogènes, comme les centrales syndicales, le sentiment d’appartenance est plus difficile à développer. Nous vivons dans une époque où les gens veulent être regroupés en fonction de leurs intérêts. Ils ont tendance à organiser des groupes Facebook pour se défendre, alors que la solution se trouve du côté de leur centrale syndicale.

À la CSQ, il y a beaucoup plus de choses qui rassemblent nos membres que de choses qui les divisent, et c’est important de le démontrer. Il faut être capable de réunir les gens, nos membres, et de s’adresser à eux dans leur quotidien.

PENSEZ-VOUS QUE LA CSQ A SUFFISAMMENT DE VISIBILITÉ?

Si être présents dans les médias signifie faire parler de nous à cause de nos coups de gueule, ce n’est pas une bonne idée. Cependant, statistiquement parlant, notre organisation a été une des plus présentes dans les médias pendant la pandémie.

En tant que président de la CSQ, je veux m’assurer que notre organisation demeure proactive : prendre des dossiers et les mettre sur la place publique et non pas seulement réagir à ce que le gouvernement ou d’autres groupes prennent comme décision.

La CSQ doit demeurer un acteur de changement social important!

ON DIT QU’IL Y A UN MALAISE DANS LE MOUVEMENT SYNDICAL PRÉSENTEMENT AU QUÉBEC. ÊTES-VOUS D’ACCORD?

Il est vrai que les 20 dernières années n’ont pas toujours été roses. Nous n’avons pas eu de très grands succès dans nos revendications. Alors aujourd’hui, quand vient le temps d’aborder d’autres sujets que le renouvèlement de nos conventions collectives, les gens se demandent pourquoi ils devraient nous suivre dans nos batailles, en environnement par exemple.

La dernière ronde de négociations a eu lieu dans un contexte social difficile, en pleine pandémie, et le résultat que nous avons obtenu est quand même surprenant! Je pense que cet évènement marque un point positif, et c’est ce dont les membres ont besoin. Ils veulent un discours positif. Ça veut dire que nous devons mettre de l’avant les bons coups que nous faisons, sans nécessairement dire que le monde est toujours tout beau!

Il faut être honnête et dire aux membres ce qui se passe vraiment, même quand ce n’est pas toujours ce qu’ils veulent entendre. Ça revient à faire preuve de transparence.

POURQUOI SOUHAITIEZ-VOUS DEVENIR PRÉSIDENT DE LA CSQ?

Pour relever tous ces défis! Je crois en une organisation comme la Centrale, je crois en la CSQ. Je souhaite assumer ce leadership et faire en sorte que les gens embarquent!

Je sais qu’il n’y a que quelques présidents, comme moi, qui ne faisaient pas partie du comité exécutif de la Centrale avant d’être élus. Cependant, mon expérience des 20 dernières années dans le milieu syndical me permet d’apporter de nouvelles idées.

Je dois encore en apprendre sur l’organisation, mais j’ai avec moi d’excellents acolytes au comité exécutif et des collègues conseillers dans différents services qui seront capables de travailler à trouver un juste milieu entre amener de la nouveauté et conserver ce qui va bien.

QUELLES SERONT VOS PRIORITÉS POUR LE PROCHAIN TRIENNAT?

En santé et en éducation, nous avons vécu énormément de changements au cours de la pandémie. Ceux-ci entraineront des répercussions sur nos milieux de travail. Nous développerons des revendications en ce sens afin d’améliorer et d’encadrer ces milieux, peu importe la catégorie d’emploi ou la tâche. C’est un triennat très riche qui nous attend!