L’organisation du travail a été chamboulée depuis le début de la pandémie et cette nouvelle réalité d’enseignement à distance soulève de nombreuses inquiétudes pour l’ensemble du réseau, affirme le président de la FPEP‑CSQ1, Stéphane Lapointe.

Stéphane Lapointe

Afin de documenter le déploiement forcé de l’enseignement à distance dans le contexte de la pandémie, la Fédération a mené une large enquête auprès de 17 syndicats et de près d’une quarantaine de membres de la FPEP‑CSQ. Lors d’entrevues semi-dirigées, ils ont témoigné des changements majeurs dans leurs conditions d’enseignement et de travail. Que ce soit du côté du personnel enseignant ou des professionnelles et professionnels de soutien, le constat est le même : la tâche a explosé. Elle s’est dédoublée et fragmentée. « Il est urgent d’agir pour mieux baliser l’enseignement à distance! », affirme Stéphane Lapointe.

Des conditions d’enseignement durement touchées

« Le tour de force réalisé par le personnel de l’éducation des établissements privés d’enseignement est remarquable. Cependant, ce virage technologique s’est fait sur le dos du personnel », ajoute le président.

La pression mise sur les enseignantes et enseignants pour basculer en ligne en quelques heures a augmenté le travail à faire. Il est faux de penser qu’il a suffi au personnel de transposer le contenu « traditionnel » à un enseignement en ligne. La planification a été repensée à de nombreuses reprises. Les évaluations ont été perturbées. Impossible d’improviser un examen rapide. La gestion de tout type de tricherie lors de la tenue d’évaluations ou lors de l’accomplissement de travaux à distance a été exponentielle. Les tâches de communication ont augmenté et se sont morcelées sur de nombreuses plateformes.

Enfin, les cours ont été scénarisés pour les adapter au nouvel environnement numérique et les rendre plus attractifs. « Même si plusieurs contenus ont pu être ajustés pour l’enseignement à distance, l’ensemble des cours et des disciplines n’ont pu être vulgairement copiés-collés sur une plateforme numérique », précise Stéphane Lapointe.

De la distanciation à la déconnexion

La relation entre le personnel enseignant et les élèves est déterminante dans la réussite éducative. Avec une relation « à distance », parfois à travers un écran noir ou bien même hors ligne faute de bande passante suffisante, la recherche a démontré un effritement de la relation enseignant-élève.

Un niveau d’autonomie inégal chez les élèves

Par ailleurs, le personnel de l’éducation s’inquiète de ses jeunes élèves. Au préscolaire et aux premier et second cycles du primaire, les enfants n’ont pas l’autonomie ou les aptitudes pour bien gérer tous les paramètres des technologies qu’ils utilisent dans ce cadre pédagogique. Les parents doivent les accompagner. Cependant, lorsqu’ils interviennent auprès de leur jeune, ils vont parfois jusqu’à s’ingérer dans les apprentissages de l’enfant.

Qui plus est, l’obligation qu’ont les jeunes élèves de certaines écoles de rester assis devant un écran pendant cinq heures est contreproductive. Cette situation doit s’accompagner d’une réflexion sociétale sur les conséquences que cela peut avoir sur le développement des enfants.

Une source de démotivation

Au secondaire, les adolescentes et adolescents contraints de suivre des cours en ligne vivent un fort niveau de désengagement et de démotivation. Le plus inquiétant, c’est que l’enseignement à distance augmente le clivage entre les élèves qui fonctionnent bien à l’école et ceux qui ont plus de difficultés.

À la lumière des résultats de la recherche de la FPEP‑CSQ, la Fédération militera pour que des balises soient rapidement mises en place. Selon Stéphane Lapointe, « il faudra limiter et encadrer l’utilisation de l’enseignement à distance lorsque la pandémie sera enfin derrière nous ».

« Le déploiement forcé de l’enseignement à distance a eu des conséquences importantes sur les conditions d’enseignement et les conditions de travail des membres de la FPEP‑CSQ. Des balises doivent être mises en place rapidement afin de respecter les droits et la vie privée des travailleuses et travailleurs tout en préservant la santé mentale des élèves. »
– Stéphane Lapointe, président de la FPEP‑CSQ


1 Fédération du personnel de l’enseignement privé (CSQ).