En raison des revenus publicitaires qu’ils accaparent, les géants du Web sont directement responsables de la crise qui secoue nos médias et ce sont ces mêmes géants qui mettent en péril notre industrie culturelle en faisant chuter considérablement les revenus de ses artisanes et artisans.

Nous l’avons dit lors de la commission parlementaire convoquée dans le cadre du mandat d’initiative sur l’avenir des médias d’information qui s’est tenue en août dernier. À l’instar de certains pays européens qui obligent désormais les gros joueurs du domaine des télécommunications à payer des impôts ou des redevances, il faut imposer ces géants du Web et utiliser les sommes perçues en les réinvestissant dans des mesures de soutien structurantes et permanentes.

J’invitais d’ailleurs le gouvernement du Québec à faire preuve de courage politique, quitte à faire cavalier seul, car le fédéral qui a promis d’agir ne l’a pas encore fait. Or, chaque mois qui passe vient affaiblir encore davantage ces secteurs qui sont pourtant vitaux pour notre culture.

La réponse du gouvernement Legault est venue juste un peu avant l’Halloween. Brandissant les épouvantails, son ministre des Finances a affirmé qu’imposer des taxes et des impôts à des compagnies qui ne sont pas établies sur le territoire du Québec équivaudrait à transgresser toutes les lois de la fiscalité internationale, ajoutant au passage que si nous décidions de les imposer, nous serions sujets à des représailles. Vous avez bien lu!

Le ministre des Finances du Québec préfère se réfugier derrière l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui devrait accoucher d’une soi-disant solution globale quelque part en 2020. Malheureusement, connaissant la puissance de lobbying de nos amis du Sud, d’où proviennent la plupart des géants du Web, cette solution risque fort de tarder, encore une fois, à être mise en œuvre ou bien d’être totalement édentée. Québec adopte donc une position de replis et d’attentisme, à l’image de celle adoptée par le Canada. Pendant ce temps, rien ne se fait et les sommes colossales qui ne sont pas perçues comme elles devraient l’être restent dans les poches de ces géants du Web.

La réponse du ministre des Finances étonne, d’autant que certains pays ont déjà décidé de mettre en place leur propre régime d’imposition temporaire des géants numériques en attendant justement la mise en œuvre des solutions de l’OCDE. Le Royaume-Uni est allé de l’avant, tout comme la France. De plus, bien qu’étant un tout petit pays, la Nouvelle-Zélande s’apprête elle aussi à emboiter le pas. Trouvez l’erreur!

D’ailleurs, c’est justement le genre de mesures unilatérales qui, combinées, mettront la pression voulue sur l’OCDE afin qu’elle accouche d’une solution musclée, rapide et structurante.

Le Québec ne doit pas avoir peur d’avoir peur. Il doit aller de l’avant et imiter d’autres pays qui l’ont fait, quitte à avancer sans le Canada. L’attentisme n’est pas une solution et se réfugier derrière des prétextes n'en est pas une non plus. L’avenir de nos médias et de notre industrie culturelle est en jeu, alors agissons sans tarder!