Après avoir invité les parents à retirer leurs enfants des classes d’éducation sexuelle1, l’archevêché de Montréal fait maintenant marche arrière. Il n’avait guère le choix, car une église qui porte un aussi lourd bilan en termes d’agressions sexuelles est très mal placée pour faire la leçon en matière d’éducation sexuelle à qui que ce soit.
Des questions pour l’archevêché
L’archevêché proposait de « développer chez l’enfant “la pudeur, une pudeur saine et qui serait la première ligne de défense contre les agressions sexuelles” ». La pudeur aurait-elle permis de protéger les femmes, les enfants et les personnes vulnérables contre les agressions sexuelles? Les milliers de femmes qui ont courageusement dévoilé les agressions dont elles ont été victimes, dans la foulée du mouvement Moi aussi, auraient-elles connues un meilleur sort si elles avaient montré davantage de pudeur? En invoquant la pudeur, le clergé n’en venait-il pas à blâmer les victimes plutôt que leurs agresseurs?
L’éducation comme moyen de prévention
À l’ère d’Internet, caractérisé par l’omniprésence de représentations stéréotypées de la sexualité, les arguments du clergé québécois semblent encore figés dans une autre époque. La meilleure façon de prévenir les agressions et le harcèlement sexuel, ce n’est pas en taisant la réalité ou en revenant à une période où l’ignorance était la règle. C’est plutôt en misant sur l’éducation et la prévention dans une approche respectueuse, structurée et cohérente.
La mise en place du programme d’éducation à la sexualité ne vise pas à se substituer au rôle des parents. Ils demeurent toujours les premiers éducateurs et doivent discuter avec leurs enfants des questions qui les préoccupent. Ce programme met de l’avant une vision positive et globale de la sexualité, tout en visant à développer des comportements respectueux et égalitaires. Il repose sur des valeurs telles que le respect de la diversité, de l’intégrité physique et psychique, et le sens des responsabilités.
La meilleure façon de répondre aux défis qui sont les nôtres en ce domaine est d’outiller les jeunes pour éviter qu’ils ne tombent dans les pièges de l’image corporelle idéale hypersexualisée et stéréotypée véhiculée dans la société.
La mise en place d’un programme d’éducation à la sexualité représente certes un enjeu délicat et crucial. Par contre, il ne saurait être optionnel, pas plus qu’il ne saurait résulter d’une démarche improvisée.
Une comparaison ecclésiastique scandaleuse
Enfin, les autorités ecclésiastiques faisaient la promotion d’un manuel destiné aux parents catholiques, qui va jusqu’à comparer le nouveau programme d’éducation à la sexualité à une agression à l’égard des jeunes... une comparaison indécente et scandaleuse venant d’une église qui, elle, n’a pas su respecter la « pudeur naturelle » de milliers de jeunes. L’archevêché était bien mal placé pour faire la leçon à qui que ce soit en matière d’agressions…
1 Éducation sexuelle : l’archevêché propose aux parents «inquiets» de s’en occuper eux-mêmes. https://www.ledevoir.com/societe/education/545199/education-sexuelle-l-archeveche-de-montreal-suggere-aux-parents-inquiets-de-s-en-occuper-eux-memes.