Québec, le 25 mars 2021. – La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) qualifie le troisième budget Girard de florilège de mesures non récurrentes où le béton occupe une place de choix par rapport aux services à la population. Pour la CSQ, la CAQ continue de proposer une relance où le masculin l’emporte sur le féminin.
« Certains investissements sont intéressants, mais ce qu’on déplore, c’est que les mesures récurrentes sont rares. Il y a un manque flagrant d’investissements durables pour les services à la population. Par exemple, pour le soutien aux élèves, on investit plusieurs centaines de millions de dollars, qui sont justifiés uniquement par la pandémie, comme si les besoins criants n’existaient pas avant. Pour soutenir la diplomation, améliorer les soins et soutenir l’économie à long terme, ce sont des investissements durables qu’il nous faut. Dans une économie du savoir, investir en éducation, en petite enfance et dans les autres services à la population est aussi important que d’investir dans le béton », souligne d’entrée de jeu Sonia Ethier.
Éducation : un soutien d’urgence qui n’est pas durable
En éducation, la CSQ est soulagée de constater que le gouvernement prend acte de l’impact de la crise sanitaire sur le réseau et des besoins en ce qui a trait à la réussite éducative de nos jeunes et des adultes. Les mesures supplémentaires totalisant 205 millions cette année pour limiter les retards d’apprentissage et pour soutenir le réseau scolaire sont plus que nécessaires. Cependant, la Centrale considère que ces efforts auraient dû être durables dans le temps. « Dans l’urgence actuelle, les mesures de tutorat, d’aide aux devoirs et de soutien psychosocial ou la création de classes spécialisées vont permettre de sortir la tête de l’eau, mais pour une courte durée. Les besoins sont nombreux et les mesures qui sont mises de l’avant ont une date d’expiration. Par le fait que les mesures ne sont pas récurrentes, le gouvernement annonce aujourd’hui qu’il y aura déjà un manque de ressources dans quelques années. Les problèmes du système d’éducation existaient bien avant la crise; on a besoin d’investissements importants et durables, et le budget n’en apporte pas », rappelle Sonia Ethier.
Étranges priorités au collégial
Le gouvernement annonce une injection de 278 millions de dollars de plus en enseignement supérieur pour 2021. Quoique positives, il faut nuancer ces mesures : non seulement elles sont temporaires, mais, en plus, la part du lion sert à payer des incitatifs financiers aux étudiantes et aux étudiants. « Évidemment qu’il faut soutenir le revenu des jeunes, mais les problèmes de persévérance doivent être attaqués en améliorant l’offre de services, le soutien pédagogique et en appuyant concrètement le personnel dans les cégeps. » Vingt millions sont prévus pour mettre en place des solutions pour l’enseignement à distance. « Il faudra voir si des sommes iront à la formation du personnel ou si tout sera dépensé en matériel informatique », s’inquiète Sonia Ethier.
Petite enfance : un secteur essentiel en péril
Pour la petite enfance, la CSQ est déçue de la timidité des mesures annoncées dans le budget pour s’attaquer à la pénurie de places et de main-d’œuvre. « Nous voyons d’un bon œil les sommes investies, bien que modestes, pour la formation et la rétention d’éducatrices qualifiées, ainsi que l’aide financière additionnelle qui seraient octroyées aux RSE accueillant neuf enfants. Nous invitons le ministère de la Famille à s’asseoir avec nous pour discuter de la mise en œuvre de cette aide et espérons qu’elle sera complémentée par d’autres mesures financières. Nous souhaitons que l’ouverture manifestée aujourd’hui par le gouvernement pour bonifier la rémunération des RSE ne soit qu’un premier geste pour stopper l’hémorragie une fois pour toutes et améliorer les conditions de travail actuellement en discussion dans l’ensemble du réseau, tant pour les intervenantes en milieu familial que pour celles en CPE », souligne la présidente.
Santé et services sociaux : priorité à la lutte contre la pandémie
Sans surprise, la lutte contre la COVID-19 demeure la priorité gouvernementale en santé. Avec des hausses de 5,8 % en 2021-2022 et de 4 % en 2022-2023 (hors dépenses liées à la pandémie), le gouvernement octroie des ressources qui devraient permettre de couvrir les coûts de système du réseau. La CSQ accueille favorablement les nouveaux investissements pour le soutien à domicile ainsi que les sommes récurrentes consenties pour bonifier les services de première ligne en santé mentale et pour les personnes vulnérables et les jeunes en difficulté. Les sommes sont modestes, mais il s’agit d’un pas dans la bonne direction. Cependant, le budget ne contient rien de concret pour stabiliser les équipes de soins et améliorer les conditions d’exercice du personnel infirmier.
Secteur communautaire
Dans le secteur communautaire, la CSQ voit d’un bon œil l’aide de 10,4 millions de dollars de bonification du financement des organismes d’aide à la réhabilitation sociale ainsi que le 50 millions de dollars aux organismes communautaires œuvrant auprès des familles, mais estime que les sommes ne permettront pas de répondre aux besoins, qui étaient déjà grands et qui se sont accrus depuis la pandémie de la COVID-19. « Particulièrement, un montant annuel de 4,5 millions de dollars dédié spécifiquement aux organismes d’intervention auprès des femmes victimes de violence conjugale nous apparaît nettement insuffisant considérant la hausse dramatique des cas de violence conjugale depuis plusieurs mois », explique la présidente de la CSQ.
Langue et culture
En culture, l’investissement de 147 millions de dollars pour bonifier le plan de relance du milieu culturel mérite d’être salué puisque ce secteur a été durement éprouvé durant les mois de la pandémie; encore une fois, cette mesure est temporaire.
Dans un contexte où l’anglicisation gagne toujours plus de terrain, le gouvernement a la responsabilité de défendre la langue commune du Québec. En ce sens, la CSQ salue l’investissement de 103,6 millions de dollars d’ici 2026 pour la promotion de la langue française et attend impatiemment la réforme de la Charte de la langue française pour en assurer une protection renforcée.
Jeter du lest sur le retour à l’équilibre budgétaire
À propos de l’équilibre budgétaire, la Centrale est rassurée que l’austérité ne soit pas à l’ordre du jour cette année. « En repoussant de cinq à sept ans l’exigence du retour à l’équilibre budgétaire, le gouvernement se donne les coudées franches pour traverser la pandémie. Par contre, nous sommes inquiets pour le futur puisque, dès 2022, la croissance moyenne des dépenses de programme chute à moins de 3 %. Pour éviter le spectre de l’austérité qui se pointe à moyen terme, nous maintenons que le ministre des Finances doit suspendre les versements au Fonds des générations », conclut Sonia Ethier.